Smos : un satellite pour l’eau

L'Agence spatiale européenne a réussi le lancement de son nouveau satellite, Smos, depuis le nord de la Russie. Il devrait permettre de cartographier l'humidité des sols et la salinité des océans à l'échelle planétaire.

Par Romain Lejeune, le 02/11/2009

Observer le sol et les océans

Smos est bien parti dans la nuit du 1er au 2 novembre comme prévu, depuis Plesetsk, au nord-ouest de la Russie. Elaboré par un consortium européen (Esa / Cnes / CDTI ¹), le satellite Smos (contraction de Soil Moisture and Ocean Salinity) a été conçu pour observer l'humidité du sol et la salinité des océans. Equipé du tout premier radiomètre 2-D interférométrique, nouveau type d'instrument qui n'a encore jamais été utilisé depuis l'espace pour regarder la Terre, Smos analysera des données marines et terrestres pendant au moins cinq ans.

« Cette mission est le fruit de plusieurs années de travaux collectifs », rappelle Yann Kerr, responsable scientifique de la mission Smos au Centre d'études spatiales de la biosphère (Cesbio-Toulouse). Le lancement d'un tel instrument de mesure dans l'espace implique en effet différents corps de métiers : des équipes scientifiques aux concepteurs, des architectes mécaniques et électriques aux orbitographes, « le tout représente plusieurs centaines de personnes, précise Yann Kerr, quelques milliers si on compte tous ceux qui ont touché à Smos de près ou de loin ».

  1. Esa : Agence spatiale européenne ; Cnes : Centre national d'études spatiales ; CDTI : Centre for the Development of Industrial Technology (Espagne).

La méthode Smos

Tour de lancement de Smos

« Les deux paramètres que Smos va étudier sont inédits, explique François Bermudo, chef de projet Smos au Cnes. Les données recueillies sur l'humidité des sols devraient permettre d'améliorer les prévisions météorologiques. Le but est de mieux prévoir les évènements extrêmes tels que les tempêtes ou les cyclones. »

« Mesurer la salinité des océans est un vrai challenge, assure de son côté l'Espagnol Jordi Font, l'un des responsables scientifiques de ce projet. Ces données sont difficilement repérables car uniquement visibles à partir de valeurs radiométriques très précises. » La salinité est un bon indicateur du fonctionnement des courants océaniques. Dans les océans, l'eau circule grâce à un mécanisme naturel complexe que les océanographes appellent le « tapis roulant ».

Un gradient de salinité existe entre les diverses masses d'eau qui recouvrent le monde. Si ce taux de salinité évolue, le « tapis roulant » se dérègle ; ce changement des courants marins influence à son tour la circulation de l'air et donc le climat des différents continents. Relever la masse de salinité des océans permettra donc d'étudier l'évolution des courants océaniques pour déterminer les modèles de prévisions météorologiques, voire climatiques.

Pour les professionnels de la ressource en eau...

Smos dans l'espace

« Pour être efficaces, souligne Yann Kerr, les chiffres devront être analysés tous les trois à cinq jours. » Ils seront envoyés sur Terre puis traités dans des centres spécialisés – Centre européen d'astronomie spatiale, en Espagne, et Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer), à Brest. « Ils seront ensuite transmis partout dans le monde à de nombreux scientifiques », complète François Bermudo. Tous les professionnels travaillant sur la question de la ressource en eau vont utiliser les résultats de Smos.

Les pêcheurs et les navigateurs, toujours à la recherche des meilleurs courants, seront des utilisateurs potentiels des informations sur la salinité, tout comme les pays confrontés aux problèmes de l'eau et des cultures qui pourront se baser sur un référencement précis des espaces les plus exploitables. « Les résultats permettront également d'offrir aux hommes et femmes politiques l'information scientifique nécessaire pour prendre les décisions qui s'imposent, afin de préserver notre climat et notre environnement », conclut François Bermudo.

Romain Lejeune le 02/11/2009