Aux origines de la crise bancaire : l'endettement

Pour soutenir la croissance, la réserve centrale américaine (FED) favorise le crédit peu cher, particulièrement après le 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Les taux d'intérêt bas attirent plus d'emprunteurs, en particulier dans l'immobilier, et donc plus d'argent disponible en circulation.

Il devient très avantageux d'emprunter de l'argent afin de le placer, car les gains rapides des placements sont toujours plus importants que les intérêts à rembourser : c'est un effet de levier. Cette situation encourage les prises de risques pour des placements peu sûrs mais très rentables à court terme.

Là où il y a du nouveau,c’est que, fortes des enseignements des crises précédentes, les banques centrales et les gouvernements sont intervenus massivement entre la fin de l’été et Noël 2008. La garantie par les banques centrales des crédits interbancaires a évité la crise de liquidité. La recapitalisation ou la nationalisation par le gouvernement des banques en difficulté a permis d’éviter la crise de solvabilité.

L'éclatement de la bulle immobilière

Les subprimes : des crédits à taux faibles mais non fixes contrairement aux autres taux (les primes) plus élevés mais qui ne varient jamais. Aux Etats-Unis, le gouvernement, les banques et les associations ont incité les ménages les moins solvables à devenir propriétaires de leur logement par le biais des subprimes.
La demande est tellement importante que les prix des maisons sont supérieurs à leurs valeurs réelles. On parle de « bulle immobilière ».

Suite à la remontée des taux d’intérêt à partir de 2005, les ménages sont très nombreux (de 5 à 15% des emprunteurs) à ne plus pouvoir rembourser leurs prêts. Les maisons hypothéquées sont saisies par les banques mais invendables. En effet, les taux d’intérêt sont trop élevés, la demande chute fortement. La bulle éclate.

L'effondrement financier de 2007 et la crise du crédit

Dès 1970, des organismes financiers créent des produits financiers complexes et très rémunérateurs. Ils insèrent les prêts à risque (prêts hypothécaires, prêts à la consommation, subprimes...) dans des titres financiers beaucoup plus sûrs. C’est la technique de la titrisation.

Le manque de rigueur, non seulement des agences de notations américaines chargées de contrôler ces produits financiers, mais aussi des banques et des autres acteurs (courtiers, assurances...) de l'industrie financière, a contribué fortement à l'effondrement financier aux USA et dans les pays occidentaux.

Le premier krach bancaire et boursier se passe au milieu de l'été 2007. Les banques d'investissement (Wall street ...), qui appuyaient leurs profits sur la bulle immobilière et les produits financiers dérivés, voient leurs valeurs s'effondrer.

La crise prend une nouvelle ampleur le 15 septembre 2008, avec la faillite de la banque d'investissement Lehman Brothers et celle de l'assureur AIG (ce dernier sauvé de justesse par la réserve centrale américaine, FED).

La conséquence immédiate de ces banqueroutes retentissantes : une crise de confiance sans précédent, traduite par le gel des prêts entre banques (prêts interbancaires) et un arrêt de toutes les opérations de crédit. Les banques ne se font plus confiance entre elles. Cette crise du crédit inter bancaire s'étend. Les banques ayant moins de fonds propres restreignent leurs crédits (credit crunch) et paralysent l'économie. La crise financière se transforme durablement en crise économique.

La chute des cours boursiers du monde entier a obligé les banques centrales à injecter massivement des fonds (des liquidités) pour soutenir les banques.Les Etats sont intervenus et ont voté des plans massifs de soutien financier au secteur bancaire pour enrayer un effondrement total de l'économie mondiale.

D'autres causes de la crise

Tout d'abord, le financement mondial avec l'excès d’épargne de pays émergents et moteurs de la croissance mondiale, comme la Chine. Depuis le début des années 2000, cet excès a été drainé par les pays développés et en particulier les Etats-Unis surendettés. Cette abondance de liquidité a favorisé de nombreuses spéculations risquées, en particulier dans les pays occidentaux.

Puis, un modèle de croissance inégalitaire

avec d'une part, le ralentissement et la stagnation des revenus des salariés occidentaux dès les années 1980, en opposition avec l’expansion des grands pays émergents et leur main d’œuvre peu qualifiée et peu chère ;

et d’autre part, la répartition des revenus des entreprises entre les salaires et les profits, en faveur de ces derniers. Cette situation a favorisé un endettement croissant des salariés pour maintenir leur niveau de vie.

Enfin, le système « productiviste » : notre régime d'accumulation et de consommation est directement remis en cause par cette crise mondiale qui pointe l'absence de prise en charge des exigences d'un développement plus durable. L'existence de politiques de protection de l'environnement et un réexamen de nos modes de production, tout en générant des coûts, éviteront des dommages plus importants encore à long terme.

La croissance économique n'est plus la solution à nos défis majeurs, tant au niveau sociétal qu'économique : fracture sociale, taux de chômage, dette publique, risques environnementaux... Pendant longtemps, jusqu’au 18ème siècle, nous avons fait de la production autrement…Le premier objectif des entreprises ne peut pas être le profit, mais la production de biens et services, et donc l'apport de valeur ajoutée.

 

Que faire pour s'en sortir ? Avis et débats d'experts

« Préparons nous à une tempête économique en 2013, selon Nouriel Roubini, professeur d'économie à la Stern School of Business...Le ralentissement économique, aux USA, au sein de la zone euro et en Chine, va mettre un coup de frein à la croissance des autres pays émergents, en raison de leurs liens commerciaux et financiers avec les USA et l'UE...Ce ne sont plus des problèmes de liquidités qui menacent, mais une crise du crédit et de la solvabilité. » Voici quelques pistes de reflexion dans le cadre de notre système économique actuelle.

1. Prioriser la croissance et augmenter les revenus ?

OUI : Relancer les entreprises qui pourront ainsi investir et embaucher, ce qui permettra de réduire le chômage et favorisera la relance de la consommation.
NON : En aidant les entreprises, les Etats vont s'endetter davantage. Ils ne seront donc plus solvables et personne ne voudra leur prêter d’argent jusqu'à leur réelle reprise.

 2. Prioriser l’austérité pour réduire la dette et rétablir la confiance ?

OUI : Les Etats pourront alors emprunter pour relancer leurs entreprises.
NON : Car cela signifie augmenter les impôts, réduire les effectifs ce qui entraînera une baisse de la consommation, augmentera le chômage et ralentira la relance de l'économie.

3. Recapitaliser les banques françaises fragilisées par leur stock élevé de dettes souveraines avec l'aide de l'Etat ?

OUI : Le Trésor emprunte pour investir dans les banques qui peuvent à nouveau prêter de l'argent. La recapitalisation publique des banques revient à les nationaliser en partie.
NON : Cela augmenterait le ratio Dette/PIB, scruté au jour le jour par les agences de notation qui dégraderont la note du pays; ce qui provoquera la méfiance du marché.

4. Se débarrasser des agences de notation Moody's, Fitch, Standard &Poors ?

OUI : Car elles sont en général payées par les institutions qu'elles doivent noter... Une autre solution consisterait à les soumettre à des contrôles et à les sanctionner en cas de défaillances avérées. Bruxelles travaille sur le sujet mais semble bien hésitant.
NON : Les agences revendiquent l’usage de formules mathématiques pour établir une notation objective, et le souci exclusif de donner une appréciation sur la capacité d'un Etat, d'une entreprise, d'une banque à rembourser ses emprunts.

5. Créer une taxe sur les transactions financières ?

OUI : Le 8 mars 2011, le parlement européen a voté en faveur d'une taxation des transactions financières, au sein d'une résolution sur les financements innovants. L'introduction de cette taxe pourrait relancer l'économie et éviter une nouvelle crise financière, estiment les eurodéputés.
NON : La commission hésite encore et il reste à convaincre les Etats qui ont peur de faire fuir les capitaux.

6. Effacer la dette d'un Etat ?

OUI : Car un Etat trop endetté ne pourra jamais rembourser sa dette.
NON : Un Etat, qui refuse de rembourser ses échéances, n'inspire plus confiance aux créanciers pour plusieurs années. Il ne peut donc plus se financer sur les marchés. C'est pour cette raison que les Etats en difficulté préfèrent avoir recours au Fonds Monétaire International. Jouant le rôle d'une commission de surendettement, le FMI accordent des prêts supplémentaires ou rééchelonne le remboursement des dettes publiques , ce qui permet aux Etats sous assistance de rester crédibles sur les marchés financiers.

7. Faire marcher la planche à billet de la Banque Centrale ?

OUI : La Banque Centrale Européenne émet de la monnaie pour racheter de manière illimitée la dette des pays en difficulté, dès leur émission.
NON : En créant de nouveaux billets, sans apport équivalent de richesse, la masse monétaire ne correspond plus à la valeur de la production. La valeur de la monnaie diminue. Il faut plus de monnaie pour continuer à vivre, il faut augmenter les salaires, c'est l'inflation. Ni la BCE, ni l'Allemagne ne le veulent.

8. Restructurer la dette d'un Etat ?

OUI : Quand la dette est beaucoup trop forte, il faut la renégocier avec de nouveaux rééchelonnements de remboursement.
NON : Car cela entraînera une hausse du montant des intérêts, ce qui forcera à passer par de nouvelles restructurations avec nouvelle hausse du montant des intérêts, allongement du remboursement, augmentation du crédit...

9. Créer des Eurobonds ?

OUI : Si, au lieu de laisser chaque pays emprunter en euros à des taux différents, les dix-sept levaient l'emprunt solidairement ? C'est l'idée des eurobonds qui mutualiseraient les emprunts au niveau européen. Ils porteraient des taux supérieurs (autour de 4%) à ceux obtenus par les pays jugés les plus sérieux (Allemagne, Finlande, Pays-Bas...), mais bien inférieurs à ceux des pays de la périphérie en difficulté.
NON : Cela reviendrait à encourager les mauvais gestionnaires. De plus, cela ne résout pas vraiment les problèmes de fond des déséquilibres financiers.

10. Créer une nouvelle gouvernance économique et monétaire à l'échelle européenne ?

OUI : Pour surveiller les budgets et les politiques budgétaires, les évolutions des indicateurs de compétitivité et des indicateurs de déséquilibre.
NON : A cause des difficultés des Etats européens à trouver un consensus sur des actions communes.