La Cité des Sciences et de l'Industrie a présenté en 1990 l'exposition La fabrique de la pensée : la découverte du cerveau, de l'art de la mémoire aux neurosciences, faisant ainsi le point sur différents aspects significatifs du développement historique de nos connaissances sur le cerveau.
L'intérêt sur ce sujet ne s'est pas démenti depuis et les travaux réalisés récemment dans ce domaine font écho aux questionnements que l'homme s'est posé tout au long de son histoire.

 

 
 

Une exposition de la Cité des Sciences et de l'Industrie (1990 - 1991)

>>> Consulter les textes et illustrations du Catalogue de l'exposition

 

 
 

Claude Galien (129 - env. 210)

>>> Consulter la traduction française des "Oeuvres anatomiques, physiologiques et médicales de Galien", vol.I (voir notamment livres 8 et 9) sur le site de la Bibliothèque Inter-Universitaire de Médecine

 

 
 

René Descartes (1596 - 1650)

>>> Télécharger le début du traité "De l'Homme" (extraits : sur la "machine" du corps) sur le site de l'Université de Québec (versions PDF, Word, RTF)

 

 
 

Pierre Paul Broca (1824 - 1880)

>>> Télécharger le texte "La topographie cranio-cérébrale, ou sur les rapports anatomiques du crâne et du cerveau" sur le site de la Bibliothèque nationale de France (PDF)

 

 
 

Jean-Pierre Changeux (1936 - )

>>> Télécharger un extrait de "L'homme neuronal", consacré aux " objets mentaux " (RTF, 57 Ko)

 

 
 

Marc Jeannerod (1935 - )

>>> Consulter la page personnelle et accéder aux articles de Marc Jeannerod sur le site de l'Instut des Sciences Cognitives de l'Université Lyon-1.

>>> Consulter l'article avec Pierre Jacob, "Quand voir c'est faire", 1999

 
     
   

C'est Alcmeon de Crotone qui fut au sixième siècle avant notre ère, le premier auteur occidental à affirmer que "ce qui gouverne siège dans le cerveau". Son œuvre fut très tôt perdue, mais exerça une forte influence. Ses conceptions furent reprises par Hippocrate, au siècle suivant et partagées en partie par Platon. Elles furent contestées par Aristote, pour qui le principe des sensations était localisé dans le cœur, la citadelle au centre du corps humain.
Quelques siècles plus tard, Galien mit en évidence le parcours de l'influx nerveux depuis le cerveau et étudia l'influence des nerfs sur le mouvement des muscles.

Philosophes et théologiens, anatomistes et médecins, se sont interrogés et disputés pendant des siècles, à qui aurait le dernier mot pour expliquer la pensée et les émotions humaines, ces "passions" qui posaient tant de problèmes scientifiques et moraux.

La révolution anatomique du seizième siècle s'accompagne d'une grande activité de représentations et d'illustrations du corps humain (Fabrique de Vésale, dessins de Léonard de Vinci).

   
     
   

Au dix-septième siècle, Descartes introduisit une séparation entre extension et pensée, corps et âme, qui ouvrit la voie à des recherches anatomiques et philosophiques. La Mettrie élimina la nécessité d'un recours à un pont entre esprit et matière (glande pinéale de Descartes), en substituant le cerveau à l'âme dans un corps désormais considéré comme une machine.
Par ailleurs, l'attention portée par Locke et Condillac, sur les sensations comme lieu de connaissance, fit du cerveau, ce lieu où aboutissent les sensations, le nœud de raccord entre les états physiques du corps et ses dispositions morales, intellectuelles et émotives (Cabanis et les idéologues).
Une métaphore employée par Diderot représente ainsi le cerveau comme une araignée au centre de la toile constituée par le réseau des nerfs. De grands anatomistes accompagnèrent ces investigations philosophiques de descriptions de plus en plus systématiques sur les nerfs et le cerveau (Vieussens, Willis et plus tard Vicq d'Azyr).

   
     
   

Le succès spectaculaire de la phrénologie, pendant les premières décennies du dix-neuvième siècle, amena à considérer le cerveau comme centre actif de toute connaissance et de toute émotion.
Les recherches sur les localisations cérébrales opposèrent les partisans de la phrénologie (Gall, Broussais) et les ennemis de la localisation (Flourens), défenseurs d'une vision unitaire de l'activité du cerveau.
Si les thèses, souvent fantaisistes, de la phrénologie ont laissé des traces dans des expressions familières telles que "avoir la bosse des mathématiques", le projet de recherche qui les soutenait inspira les premières localisations de certaines fonctions au niveau du cortex. On peut citer en premier lieu les recherches de Broca sur les aires cérébrales responsables du langage.
Les fonctions cérébrales ne furent pas seulement le centre d'intérêt de ces anatomo-physiologistes. Les sensations et les émotions avaient également trouvé leur place dans les courants d'études qui regardaient l'homme en tant qu'espèce et l'homme en tant qu'individualité. Effectivement, les grandes synthèses sur l'histoire de la vie sur terre et la place que l'homme y occupe, font référence à la sensibilité physique et au mécanisme des sensations (Lamarck) ou aux habitudes et à la volonté de l'homme (Darwin). Les troubles de fonctionnement du cerveau avaient par contre ouvert la voie à une investigation psychologique sur les comportements de l'homme et de la femme, en tant qu'êtres soumis à leurs émotions (les patientes hystériques de Charcot), à des pensées secondes (Janet) ou inconscientes (Freud).

   
     
   

Dès la fin du dix-neuvième siècle, presque toutes les grandes révolutions scientifiques et techniques, de l'électronique à la mécanique quantique, de la génétique à la microbiologie moléculaire, avaient trouvé leur application dans l'étude du système nerveux central. Le développement des recherches sur l'électricité, la chimie organique et la microscopie, permirent d'aborder l'étude du cerveau avec de nouveaux instruments et de renouveler des traditions de recherche jusqu'alors fondées exclusivement sur une anatomie descriptive du cerveau.

La découverte des cellules du système nerveux (que l'on appellera "neurones") par Golgi et Cajal, grâce à une nouvelle technique de coloration, furent fondamentales pour les études successives sur la forme, les propriétés, les fonctions et les connexions des neurones (en particulier les travaux sur les réflexes de Sherrington).
En ce qui concerne l'anatomie générale du cerveau, Sperry détermine la différence de fonctions entre cerveau droit et cerveau gauche, grâce à l'étude de patients ayant des lésions du corps calleux et Penfield établit une carte des localisations ("homunculus") de la sensibilité somatique dans le cortex cérébral : à chaque partie du corps sensible correspond une région plus ou moins grande du cortex.

   
     
   

Le vingtième siècle voit une entreprise de naturalisation des objets de la philosophie de l'esprit (perception, langage, émotions, intelligence) grâce à l'intervention des neurosciences, capables de donner lieu à une science unifiée (Churchland), les sciences cognitives. L'approche neurophysiologique a été appliquée aussi à l'étude du rêve afin de délimiter les structures qui en sont responsables (Jouvet).

D'autres théories du fonctionnement mental se veulent indépendantes de la réalisation physique des activités mentales (analogie de l'esprit avec l'ordinateur, selon les modèles de Turing et les cybernéticiens).
D'autres encore tentent d'enraciner ce qu'on nomme "esprit" dans le corps : James, dès 1887, avait tracé un parcours des comportements du corps aux émotions intimes ; plus récemment, Damasio poursuit ce cheminement en essayant de montrer le rôle essentiel des émotions dans le fonctionnement cognitif. Cette activité cognitive est en même temps affectée par l'interaction du sujet et de son environnement, qui va jusqu'à modifier la structure fonctionnelle du cerveau (théories de la sélection neuronale de Changeux; darwinisme neuronal d'Edelman).

   
     
 

Sur la base de ces études scientifiques, des théories philosophiques (Chalmers et Clark) revendiquent la condition incarnée de la connaissance ("embodied cognition"), ou "inscription corporelle de l'esprit" (Varela).

On dit avec raison, que le cerveau humain continue à attirer les savoir-faire théoriques et instrumentaux les plus divers, tout en restant l'un des objets les plus difficiles à appréhender.
Comme on l'a vu par cette brève présentation, de multiples points de vues et prises de positions ont vu le jour, entre biologie et philosophie, entre matérialisme et spiritualisme... Pour comprendre ce qu'on sait aujourd'hui sur l'esprit et le cerveau, on ne peut pas ne pas considérer l'imbrication entre biologie et philosophie et l'histoire de cette relation (Jeannerod).

   

Pietro Corsi

Pour tout renseignement complémentaire vous pouvez contacter :
pcorsi@univ-paris1.fr

La version anglaise de cette page propose d'autres ressources que celles présentées ici
>>> Pour les découvrir, rendez vous sur Brain through the Ages

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>>> Histoire des théories de l'évolution
>>> Présentation générale
   
 
       
 
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