Le Monde de Franquin
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La chambre noire

Le couloir des Jivaros

Transition entre l'univers de Gaston Lagaffe et “La chambre noire”, deuxième thématique abordée par l'exposition, un couloir expose dans des vitrines à l'éclairage spectral, les têtes réduites, selon la coutume Jivaro, de Gaston, de Monsieur de Mesmaeker, de Prunelle et du dessinateur Lebrac. En regard, la planche où Franquin met en scène son invention permet de mieux comprendre l'humour décalé de Gaston, qui préfigure en quelque sorte la nouvelle période de l'artiste.

En rupture avec l'univers fantaisiste et coloré de Gaston Lagaffe, une salle ronde, baignant dans un éclairage tamisé, dévoile l'univers particulier et moins connu des albums de la série “Idées noires”. Au centre, une sculpture retient l'attention, elle représente en trois dimensions le labyrinthe sphérique sans issue dans lequel un homme se perdra. Elle matérialise immédiatement l'ambiance particulière qui imprègne l'ensemble des planches réalisées pour cette série. Reflet de la face sombre de l'humanité, les “Idées noires”, comme le concédait d'ailleurs Franquin, sont du « Gaston trempé dans la suie ». Poursuivant sa dénonciation des injustices du monde contemporain, l'auteur abandonne la couleur.

La scénographie est volontairement dépouillée afin de privilégier la proximité nécessaire à la découverte des planches originales présentées dans cette salle. N'utilisant plus que la plume et l'encre de chine et maniant en virtuose l'humour le plus noir, le travail de Franquin, d'une précision diabolique, suscite un étrange sentiment où l'amusement se teinte bien souvent d'une subtile impression de malaise. "Je crois que c'était toujours fait pour faire rire, mais c'est fait avec méchanceté : certaines sont très méchantes, c'est évident, il y en a certaines qui se foutent de l'espoir."

 “L'illustre Trombone” Dans cette lignée, la salle suivante “L'illustre Trombone” est entièrement consacrée à la présentation d'une vingtaine de bandeaux titres réalisés pour le Trombone Illustré. Bel exploit dont le mérite revient à Yvan Del Porte, rédacteur en chef du Journal de Spirou et à André Franquin qui parviennent, en 1977, à persuader les éditions Dupuis de leur laisser l'entière maîtrise d'un cahier supplémentaire du journal. Plus particulièrement destiné aux adultes, le Trombone Illustré adopte dès son premier numéro, un ton et un style décalés qui tranchent résolument avec l'esprit un tan­tinet conformiste qui règne alors au sein de la rédaction. Certaines des “Idées noires” seront ainsi publiées pour la première fois dans le Trombone Illustré, malheureusement supprimé après une trentaine de numéros. Franquin se tournera alors vers Fluide Glacial qui accueillera régulièrement dans sa pagination ces chefs-d'œuvre de l'humour noir.