Sida : forte progression du virus en Europe de l’Est

La 18e Conférence internationale sur le sida s'est achevée vendredi 23 juillet à Vienne. Parmi les nombreux thèmes abordés, l'un a longuement été débattu : la progression de la maladie en Europe de l'Est qui touche principalement les jeunes et les toxicomanes.

Par Romain Lejeune, le 05/08/2010

Une augmentation significative

Décès liés au virus du sida avec ou sans traitements antirétroviraux

L'épidémie liée au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) s'étend en Europe de l'Est. Lors de la 18e Conférence internationale sur le sida qui s'est tenue à Vienne du 18 au 23 juillet 2010, de nombreux chiffres ont été discutés. En 2008, 80 000 nouveaux cas ont été recensés dans cette région, soit 60 000 de plus qu'à l'Ouest, où l'évolution annuelle du nombre de malades reste stable. Selon un rapport publié par le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef), l'épidémie a augmenté de 66% en Europe de l'Est depuis 2001.

Le nombre de personnes vivant avec le VIH en Europe orientale et en Asie centrale est passé de 900 000 à 1 500 000 en dix ans. Près de 90% des personnes infectées vivent soit en Fédération de Russie (69%), soit en Ukraine (29%). Selon des chiffres communiqués par le programme commun des Nations unies sur le VIH (Onusida), depuis 2001, l'Ukraine a les niveaux d'infection les plus élevés déclarés de toute l'Europe avec une prévalence du VIH chez l'adulte supérieure à 1,6%. Dans cette région, les usagers de drogues par injection sont les principales victimes de l'épidémie.

En cause ? Un système de santé qui souvent pénalise les toxicomanes. Pour cette frange de la population particulièrement exposée, l'accès aux traitements antirétroviraux reste difficile. L'épidémie est d'autant plus virulente qu'elle est nourrie par une stigmatisation sociale qui dissuade les populations touchées par le virus de chercher un traitement ou des informations sur la prévention.

Des lacunes sanitaires persistantes

Développement du virus du sida

Dans la revue Science, les propos tenus par Alexey Mazus, responsable à Moscou du Centre pour la prévention et le traitement du sida, ont fait débat lors de la Conférence de Vienne. Selon lui, substituer une drogue injectable par un produit de substitution comme la méthadone reviendrait à « traiter un alcoolique avec de l'alcool » et ce, alors que les programmes de traitement de substitution associés à des programmes d'échange de seringues constituent la seule politique de santé publique réellement efficace pour obtenir une réduction des risques de contamination au sein de la population toxicomane.

La mise en œuvre d'une telle politique semble donc pour l'heure refusée par la Russie, d'où l'augmentation continue des infections. Pour Anthony Lake, directeur exécutif d'Unicef, « le VIH progresse plus vite dans ces régions du monde que n'importe où ailleurs, y compris en Afrique ».

Un dernier indicateur de la gravité de la situation : selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), dans l'ensemble des pays à faible ou moyen revenu, 42% des personnes séropositives ont accès au traitement contre le sida, contre seulement 23% en Europe orientale. Aujourd'hui, 80% des personnes infectées par le VIH en Europe de l'Est ont moins de 30 ans, et un tiers des nouvelles contaminations touchent des jeunes de 15 à 24 ans.

Romain Lejeune le 05/08/2010