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O. Pourquoi certains cas de Covid-19 sont-ils graves ?

Chez certains patients, la Covid-19 présente des formes particulièrement sévères. On assiste, chez eux, à un affolement de la réponse immunitaire, cette réaction pourtant chargée de lutter contre les infections.  

Lors d’une infection, des globules blancs aptes à détruire les virus et les cellules infectées migrent vers la zone malade. Cet afflux est régulé grâce à des protéines appelées cytokines. Avec le SARS-CoV-2 on constate une surproduction néfaste de cytokines. Les cytokines ne restent pas localisées au lieu de l’infection. Elles diffusent dans tout le corps et déclenchent la défaillance de nombreux organes. On parle d’« orage cytokinique ».

La survenue de cet événement serait favorisée par un système immunitaire moins réactif aux nouvelles infections, comme celui des sujets âgés. Les pathologies chroniques comme l’obésité, certaines atteintes cardiovasculaires ou respiratoires, l’insuffisance rénale, le diabète favorisent aussi cette séquence d’événements. Ces maladies se caractérisent par l’arrivée constante de globules blancs dans les organes malades et l’activation continuelle de cytokine dans ces mêmes organes, particularités qui expliqueraient la grande facilité du système immunitaire à s’emballer.
Cependant, des individus relativement jeunes, dont quelques enfants, ont présenté des formes graves de la maladie en l’absence de ces facteurs. Voilà ce qui pousse les chercheurs à identifier les autres paramètres aggravants.

Des travaux ont révélé, chez 3 % des patients gravement atteints, une défaillance particulière d’origine génétique : l’impossibilité complète de produire l’interféron (voir question N).

Une faible production d’interféron est couramment observée dans la Covid-19 symptomatique. Souvent, la maladie est d’autant plus grave que l’interféron fait défaut.

Mais l’interféron peut être secrété sans pour autant être actif.

C’est le cas chez 10 % des patients gravement atteints (très majoritairement des hommes âgés). Ils synthétisent des anticorps dirigés contre l’interféron, neutralisant ainsi malheureusement son action.

L’efficacité propre de l’interféron joue également. C’est en activant certains gènes que cette molécule permet à l’organisme de s’opposer précocement à une infection virale. Parmi ceux-ci, le gène OAS (porté par le chromosome 12) intervient dans la dégradation de l’ARN viral, donc dans la destruction du programme génétique d’un virus qui vient d’infecter une cellule. Certaines personnes bénéficient d’une variante de ce gène très performante pour protéger contre les formes graves de la Covid-19, le gène OAS-1. Par son intermédiaire, l’efficacité de l’interféron est accrue. Ce gène, présent chez huit individus d’origine africaine sur dix, expliquerait que le continent africain soit beaucoup moins touché par la Covid-19.

On a découvert d’autres gènes, cette fois-ci portés par le chromosome 3, intervenant dans la réaction à la Covid. Leur origine peut paraître surprenante :  c’est un héritage de l’homme de Neandertal, acquis lorsqu’Homo sapiens s’est hybridé avec Homo neanderthalensis (l’homme de Neandertal) à une période estimée à 50 0000 ans. Mais leur présence multiplie par trois le risque de développer une forme sévère de la maladie, sans qu’on en connaisse précisément la raison. Cette série défavorable est pratiquement absente en Asie du Sud-Est (Chine, Philippines, Japon). Mais elle est portée par environ 16 % des Européens, 50 % des Indiens et très répandue au Bangladesh (63 % de la population).

La génétique explique donc, en partie, les réactions différentes manifestées devant la maladie.

Enfin, 60 % des cas graves de Covid présentent une lymphopénie, c’est-à-dire une diminution considérable du nombre de certains lymphocytes T circulant dans le sang, ceux chargés d’activer d’autres cellules de l’immunité. Comme pour le VIH, le virus responsable du sida, le coronavirus entraîne le suicide cellulaire (ou apoptose) de ces lymphocytes T, infectés ou non, laissant le corps sans défense. Cette mort cellulaire programmée serait due à une activation des caspases, des enzymes responsables du processus d’apoptose. L’administration de molécules appelées inhibiteurs de caspases constitue une piste thérapeutique supplémentaire pour les patients hospitalisés.

informations mises à jour le 11/10/2022