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Le papier et l'encre électroniques révolutionnent l'édition

Le papier électronique, (e-paper en anglais) c'est avant tout de l'encre électronique (e-ink) incluse entre deux feuilles plastiques souples et transparentes, imitation moderne d'une feuille imprimée.

L’encre électronique est constituée de minuscules capsules contenant des microparticules noires et blanches chargées électriquement (négativement pour les noires, positivement pour les blanches). Les capsules sont disposées entre deux feuilles transparentes chacune dotée d’un circuit imprimé semi-conducteur. A l’application d’un champ électrique positif à la surface de la feuille, les particules noires migrent vers la surface et deviennent visibles (Idem pour les particules blanches lorsqu’un champ négatif est appliqué). On peut produire des niveaux de gris en faisant migrer simultanément les particules blanches et noires de part et d’autre de la capsule.

Contrairement aux écrans classiques rétro-éclairés, l'encre électronique ne nécessite pas d’énergie pour laisser un texte - ou une image - affiché. La source d’énergie n’est utilisée que lors du changement de pages. De plus, elle utilise la lumière ambiante de la même manière que le papier, pour un confort visuel optimal.

Outre le marché du livre électronique, le papier électronique intéresse énormément la presse écrite. Avec un coût de fabrication de quelques dizaines d’euros par feuille, réduit à une quinzaine d’euros en cas de production en grande série, peu gourmand en énergie et particulièrement souple, il va bouleverser tout le secteur "papier". L’encre électronique peut également révolutionner l’industrie de l’emballage, avec des packaging intelligents dans les grandes surfaces ou encore devenir la star des téléviseurs de poche et des téléphones mobiles à écrans flexibles.

Les supports de lecture numérique évoluent et se diversifient

La lecture des livres numériques - de la presse également - s’est développée sur les tablettes, smartphones et ordinateurs. Grâce aux applications de lecture, il est de plus en plus en facile d’acheter, télécharger et lire des livres numériques sur ces supports. Les grands acteurs - Amazon, Apple, Google - ont leurs propres applications propriétaires - Kindle, iBooks, Google Play Livres - permettant de lire les ebooks achetés sur leur plateforme. En même temps, des applications non propriétaires, ouvertes, se sont multipliées. On peut citer le succès de l’application Aldiko, lancée en 2009, qui a été fulgurant parmi les possesseurs de tablettes sous Android. Elle a passé le cap des 20 millions de téléchargements dans sa version gratuite début 2015 et a démontré combien l’usage des tablettes comme appareil de lecture est prononcé.

Dans ce contexte, les appareils à encre électronique - historiquement les premiers supports pour lire des ebooks - ont eux aussi évolué. Dix ans après leur premier lancement, les lecteurs d'ebooks - aussi appelés e-readers ou liseuses - s’appuient sur leurs spécificités : un confort de lecture proche de celui du papier, disposant d'un écran sans reflet, qui permet de lire en plein soleil, peu gourmand en énergie. Pour séduire un plus large public, les fabricants ont amélioré leurs appareils : écran tactile, éclairage, accès Wifi, connexion 3G... Et ils proposent des appareils de moins en moins chers. Autre innovation qui tarde à arriver : l’encre électronique couleur qui permettrait d’élargir la lecture aux magazines et à la bande dessinée...

Formats et DRM : difficiles de s'y retrouver

L'ePub "electronic publication", format de livre numérique le plus fréquent, rencontre un succès de plus en plus grand. Ouvert et standardisé, l'ePub est conçu pour faciliter la mise en page du contenu, le texte affiché étant ajusté pour le type d'appareil de lecture. Créé par la société américaine Adobe, le PDF "Portable Document Format", format plus ancien, s'est imposé aujourd'hui comme un standard international. Il est lisible sur tous les supports de lecture numérique. Cependant, l'avantage du format ePub est de laisser la liseuse recomposer les pages en changeant la taille des caractères, la police, l'interlignage. Autant de choses impossibles avec le PDF, qui est aussi "flexible" qu'une image... La plupart des modèles de liseuses sont compatibles avec le format ePub, avec une exception de taille : le Kindle d'Amazon ne supporte pas le format ePub et dispose d'un format propriétaire, Azw !

Difficile de parler des différents formats, sans parler de la gestion des droits numériques. Les DRM "Digital Right Management" permettent de contrôler l'utilisation des œuvres numériques et donc d’empêcher toute copie illicite. Les fichiers payants des livres numériques sont verrouillés avec des DRM. Il s’agit la plupart du temps de fichiers sur lesquels a été apposé un cadenas limitant le nombre de copies. Différents systèmes de DRM existent. Amazon verrouille ses fichiers avec un système propriétaire. Ils ne sont alors lisibles que sur ses propres tablettes, les Kindle. Apple a lui aussi créé un univers fermé avec un DRM propriétaire dont il équipe les fichiers qu’il vend dans son iBookStore. Seuls les iPad et les iPhone sont capables de les déchiffrer. Les éditeurs et les distributeurs qui, à l’inverse, ne maîtrisent pas l’intégralité de la chaîne de distribution des livres numériques (Numilog, Fnac, Relay, ...) optent pour des formats verrouillés avec des DRM Adobe.

Évidemment, ces différents systèmes ne sont pas compatibles entre eux ! Il est donc impossible de lire sur un Kindle d'Amazon un fichier acheté sur l’iBookStore d’Apple ou de lire un fichier acheté sur Fnac.com sur un iPad ou un iPhone... Mais les éditeurs, conscients de la complexité de ce système et sous la pression de plus en plus grande des lecteurs, commencent à proposer des ouvrages sans DRM.

Le prix du livre numérique fait débat

Comment déterminer le "bon" prix pour un livre numérique ? Pour les éditeurs, il doit répondre à plusieurs préoccupations qui peuvent s'avérer contradictoires : développer ce marché nouveau qui peut être prometteur, rentabiliser les investissements nécessaires à la numérisation et éviter l'expansion de la piraterie, qui a laminé l'industrie musicale et touche déjà les best-sellers. Les maisons d'édition ont compris que la clef du succès sur Internet était un prix bas pour le consommateur. Elles ont donc œuvré pour une baisse de la TVA appliquée au livre numérique. Le taux a été ramené le 1er janvier 2012 de 19,6 % à 5,5 %, comme pour le livre papier. Depuis, sous la pression de l'Union Européenne qui a toujours considéré que la TVA sur les biens dématérialisés doit être équivalente dans tous les pays et doit être à 20 %, la France pourrait devoir remonter la TVA sur le livre numérique en 2015...

Mais jusqu'où descendre les prix ? Que faire au moment de la sortie de l'édition de poche en version imprimée, aujourd'hui source de profits essentiels pour les grandes maisons ? Faut-il proposer les oeuvres dématérialisées à moins de 5 € (soit l'équivalent d'un livre de poche à prix cassé) ?

Les maisons d’édition soutenues par les libraires, se sont mobilisées pour que le principe du prix unique, créé pour les ouvrages imprimés, soit transposé aux oeuvres dématérialisées. Leurs objectifs ? Préserver la création, protéger les marges des éditeurs pour rémunérer les auteurs et assurer la diversité de l'offre éditoriale. A cela s'ajoute une autre préoccupation : la survie des libraires. Des parlementaires se sont emparés du sujet et l'Assemblée nationale a adopté la loi sur le prix unique du livre numérique en février 2011 : les livres numériques sont donc vendus par les distributeurs français au prix fixé par l’éditeur. Cependant, il faut souligner la complexité qu'il y a à faire appliquer cette loi aux plateformes de diffusion établies hors de France...

Les attentes des lecteurs sont loin d'être comblées

Un peu plus d’un Français sur 10 est lecteur de livres numériques. Quelles sont les raisons d'une si faible proportion ? Quelles sont les attentes des lecteurs de livres numériques et lecteurs en général ?

Tablettes, smartphones, ordinateurs n’offrent pas encore un confort de lecture optimal. Cogniticiens, psychologues et ergonomes s’accordent à dire que lire à l’écran présente des inconvénients : chute de la vitesse de lecture, difficulté à repérer les mots, à mémoriser le sens du texte… Et l'inconvénient majeur reste la fatigue visuelle. Cependant ces écueils concernent surtout les écrans classiques, et le papier électronique améliore la lisibilité et le confort de lecture.

L’offre actuelle est assez faible. Beaucoup de titres ne sont pas disponibles en format numérique. On parle de 90 000 titres disponibles quand il y en a 700 000 sur le marché papier ! Les plateformes d’achat paraissent adaptées aux lecteurs d’ouvrages plutôt "grand public" mais semblent moins satisfaire des lecteurs à la recherche d’écrits plus spécifiques.

Les prix de vente des livres numériques sont perçus par une majorité comme trop élevés. Ils sont souvent situés aux alentours de 80 % du prix d’une première édition. Contrairement aux Etats-Unis où Amazon propose une stratégie de l'ebook à 9,99 dollars. Pour le public, le prix d’un livre numérique devrait se situer sous la barre des 10 euros, voire au prix d’un livre de poche.

La présence de DRM (protection anti-copie) est souvent considérée comme un frein à l'achat et à l'utilisation d'un livre numérique. Les lecteurs souhaitent garder le droit d’en conserver le contenu, d’en disposer aussi bien sur leur smartphone que sur leur liseuse, et de le partager aussi simplement qu’ils prêtent un livre papier.