C'est
au prix d'un aveuglement grave que les développements des
sciences modernes et surtout des techniques qui en portent et diffusent
les orientations sont conçus en termes de régulation-dérégulation-réparation.
Ces développements contemporains sont du côté
de la démesure; en un mot, les performances scientifiques
et techniques déferlent.
On
le voit bien dans le cas des OGM végétaux. Ils ont
été mis au point et développés dans
le cadre de relations entre la recherche et l'industrie qui se sont
constituées sur le mode d'un court-circuit liant immédiatement
des savoir-faire techniques hautement efficaces, peu conceptualisés
et des intérêts industriels et financiers. En quelques
années, la mise en uvre industrielle de ces OGM dans
un certain nombre de pays porte déjà sur 56 millions
d'hectares et nourrit 400 millions de personnes. Pourtant les biologistes
savent que des risques incontournables sont liés à
des modifications aussi importantes, aussi rapides des contraintes
du milieu. Dans un contexte différent, ce déferlement
technique peut se lire dans le cas de la fécondation et la
gestation humaine. L'ensemble des filières techniques de
visualisation de l'embryon, des tests génétiques pré
et post-implantatoires, ouvrent des horizons thérapeutiques
éventuellement intéressants mais qui font voler en
éclats les représentations collectives et l'encadrement
juridique de ces événements majeurs de la vie sociale.
mai
2002
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Michel
Tibon-Cornillot
Ingénieur
de formation, agrégé de philosophie et docteur ès
lettres, il est chercheur à l'Ecole des hautes études
en sciences sociales (EHESS). Il a travaillé à l'Institut
Pasteur dans un laboratoire de biologie moléculaire sur les
thèmes liés à la maîtrise contemporaine
du vivant. Michel Tibon-Cornillot a publié au Seuil, en 1992,
"Les corps transfigurés, mécanisation du vivant
et imaginaire de la biologie."
Les
champs de l'expérimentation
A
propos du naufrage des sciences de la vie
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