SeaOrbiter : première base habitée flottante ?

C'est un projet surprenant, digne de Jules Verne, que conduit actuellement l'architecte Jacques Rougerie. Avec SeaOrbiter, le spécialiste du monde sous-marin compte créer une station océanique habitable qui dérivera au fil des courants, permettant aux chercheurs d'étudier in situ le milieu marin durant de longues périodes.

le 20/09/2005

Un projet sans précédent

Exercice difficile que de décrire SeaOrbiter. Ce n'est pas tout à fait un bateau océanographique. Pas tout à fait non plus une habitation sous-marine. Le qualificatif de « bouée géante dérivante » parait également réducteur.

SeaOrbiter est pourtant tout cela à la fois : une station d'observation marine capable de dériver au fil des courants océaniques.

Imaginé et conçu par l'architecte Jacques Rougerie, pionnier des habitations sous-marines, SeaOrbiter se présente ainsi comme un bateau d'une cinquantaine de mètres mis à la verticale. Plus de la moitié de la structure, 31 mètres exactement, sont ainsi immergés.

SeaOrbiter, qui peut accueillir jusqu'à 18 personnes, est en réalité constitué de deux modules. La partie supérieure, répartie sur plusieurs niveaux est à la pression atmosphérique. La partie inférieure, en revanche, est pressurisée, permettant ainsi à une partie de l'équipage de vivre et de sortir sous l'eau sans avoir à remonter à la surface après chaque plongée, leur évitant ainsi d'inévitables paliers de décompression*.

* néanmoins, les membres de cet équipage devront effectuer leurs paliers de décompression à la fin de leur séjour.

« Sentinelle des océans »

Jacques Rougerie voit en SeaOrbiter un moyen d'aborder le monde sous-marin sous un nouveau regard.

« Contrairement au sous-marin ou au navire océanographique, SeaOrbiter permettra d'observer la mer en permanence, nuit et jour, explique-t-il. Si vous êtes témoin d'un phénomène de l'autre côté du hublot, libre à vous d'ouvrir le sas et d'aller l'observer en scaphandre ou à bord d'un submersible de deux places ».

Et nul doute que les observations seront nombreuses : dérivant au fil des océans, SeaOrbiter devrait en effet attirer autour de lui toute une faune, créant ainsi une « oasis de vie » que les scientifiques pourront étudier à loisir.

L'architecte compte également faire de SeaOrbiter un outil de vulgarisation à la disposition du plus grand nombre, en particulier les écoles, les caméras installées à bord de SeaOrbiter diffusant en permanences leurs images sur Internet. Plus inattendu, Jacques Rougerie compte mettre son engin à la disposition de la Nasa pour l'entrainement des astronautes. « Dans SeaOrbiter, les hommes vivent dans un habitacle confiné, en équipage, dans une configuration assez proche d'une capsule spatiale. Dès que l'on sort dans le milieu aquatique, les gestes, les mouvements, l'ergonomie se rapprochent de l'espace », souligne ainsi Jacques Rougerie.

Folie d’architecte ?

Essai en bassin de SeaOrbiter

SeaOrbiter n'existe encore que sur le papier. Mais qu'on ne s'y trompe pas, loin d'être une simple folie d'architecte, le projet est déjà bien avancé. Initié il y a quatre ans, SeaOrbiter a déjà apporté les preuves de son bon comportement en mer grâce à un modèle réduit de l'engin testé en Norvège.

Reste à boucler le financement du projet : 25 millions d'euros (construction et exploitation comprises). « C'est un projet relativement peu coûteux, souligne Jacques Rougerie, moins coûteux qu'un navire océanographique ou même qu'un voilier de l'America's Cup ! ».

Plusieurs partenaires privés font déjà partie de l'aventure. Mais 20 millions sont encore manquants. Jacques Rougerie, qui est actuellement en pourparler avec plusieurs entreprises, semble néanmoins très confiant : pour lui, nul doute que l'on pourra voir voguer SeaOrbiter dès 2008.

le 20/09/2005