Hayabusa en difficulté : les poussières d'astéroïde reviendront-elles sur Terre ?

La sonde japonaise Hayabusa ne reviendra pas sur Terre avant 2010, si toutefois elle revient… En effet, après avoir peut-être prélevé pour la première fois des poussières à la surface d'un astéroïde, la sonde est désormais hors de contrôle.

le 15/12/2005

Après le succès, la panne

Hayabusa

Les dernières semaines auront été éprouvantes pour les responsables de l'Agence spatiale japonaise (JAXA). Après quelques déconvenues*, la sonde Hayabusa a finalement pu effleurer brièvement l'astéroïde Itokawa afin d'y prélever quelques grammes de poussières. Une manœuvre inédite et particulièrement délicate, réalisée à 300 millions de kilomètres de la Terre !

Reste qu'après cet exploit, une panne rencontrée sur l'un des propulseurs de la sonde a empêché les techniciens d'orienter l'antenne d'Hayabusa en direction de la Terre. Résultat : Hayabusa ne pourra pas rentrer en 2007 comme prévu. Il faudra attendre trois années avant que la sonde et la Terre ne se trouvent à nouveau dans une position et à une distance idéales pour amorcer le trajet de retour. A condition toutefois que la JAXA parvienne à reprendre le contrôle de la sonde…

* perte d'un mini-robot, tentative de prélèvement d'échantillon avortée...

Un début de mission sans encombre

Le périple d'Hayabusa avait pourtant bien commencé. Lancée dans une indifférence presque totale le 9 mai 2003 de la base de Kagoshima au Japon, la sonde de 500 kg est partie rejoindre sans aucun incident l'astéroïde Itokawa (1998SF36), un petit corps rocheux de seulement 600 m de long sur 200 m de large, orbitant entre la Terre et Mars.

Mission pour Hayabusa : étudier Itokawa à l'aide de ses nombreux instruments (caméra, spectromètres…). La sonde est également programmée pour déposer un mini-robot équipé de caméras à la surface de l'astéroïde. Mais l'objectif principal de la mission reste sans conteste le prélèvement de poussières et leur rapatriement sur Terre.

Un « fossile » du système solaire

Le 12 septembre 2005, après un périple de plus de deux ans, Hayabusa se place en orbite autour de Itokawa et réalise les premières images de l'astéroïde. C'est l'étonnement. Ce petit corps présente une structure incroyablement granuleuse. L'astéroïde semble ainsi composé d'une agglomération de blocs rocheux dont les plus gros atteignent quelques dizaines de mètres. Par ailleurs, le nombre de traces d'impacts visibles semble extrêmement réduit. Pour expliquer cette structure inhabituelle, les scientifiques comptent énormément sur la suite de la mission.

Premiers incidents

Tout ne se déroule pourtant pas comme prévu. Le 31 juillet 2005, l'un des trois gyroscopes tombe en panne. Le 2 octobre, la sonde en perd un second, l'obligeant à utiliser ses propulseurs chimiques pour stabiliser ses mouvements. Une première tentative de prélèvement est alors annulée.

Les ennuis se poursuivent avec le mini-robot. Un rover fourni par la Nasa devait initialement être déposé sur l'astéroïde afin d'en étudier la surface. Le projet ayant été abandonné pour des raisons budgétaires, les Japonais ont décidé de concevoir eux-mêmes leur mini-robot.

« Minerva » n'est pas plus grand qu'une boîte de conserve et ne pèse que 500 grammes mais il est équipé de trois caméras et de six capteurs thermiques. Ce mini-robot est également capable de se mouvoir, non pas avec des roues, ce qui serait totalement inefficace en raison de la très faible pesanteur, mais grâce à une masse mobile se déplaçant brusquement à l'intérieur du module… Tant d'ingéniosité pour rien : le 12 novembre 2005, après un largage raté, le petit robot se perd dans l'espace.

Atterrissage non contrôlé

Le clou de la mission demeure malgré tout le prélèvement de poussières. Une étape particulièrement délicate si l'on considère la distance qui sépare Hayabusa de la Terre, près de 300 millions de kilomètres : un message envoyé du Japon met ainsi 17 minutes pour parvenir à la sonde. Impossible dans ces conditions de la piloter en temps réel : c'est l'intelligence artificielle de la sonde qui décide seule de la marche à suivre durant la phase de prélèvement.

Le 19 novembre, une première tentative a lieu. À 40 m d'altitude, Hayabusa lance sur Itokawa un repère (une boule de 10 cm) afin de faciliter la manœuvre d'approche. Mais à 17 m d'altitude, le signal est brusquement interrompu. La sonde a  vraisemblablement tenté d'éviter un obstacle, une manœuvre durant laquelle son antenne n'était plus orientée vers la Terre. Quelques minutes plus tard, le contact est rétabli. Les données altimétriques recueillies par la suite montrent que Hayabusa a vraisemblablement frappé le sol de l'astéroïde violemment. Nul ne sait si une prise d'échantillon a eu lieu.

Prélèvement réussi ?

Le 25 novembre, les responsables de la mission se félicitent de la réussite du second prélèvement. Une satisfaction de courte durée...

Le 25 novembre, Hayabusa se lance dans une seconde et ultime tentative. Une fois de plus, la sonde interrompt ses communications lors de sa manœuvre d'approche. Lorsque les communications reprennent quelques minutes plus tard, la sonde semble indiquer que le prélèvement s'est bien effectué.

« Ce deuxième contact réussi avec Itokawa ainsi que la collecte de matière, autre que des échantillons lunaires, prouve que nous sommes capables de réaliser des exploits de top-niveau », se félicitent les responsables japonais de la mission : ni la Nasa, ni l'Esa n'ont tenté à ce jour de relever ce défi.

Reste que nul ne sait aujourd'hui si la sonde, vraisemblablement fragilisée lors de sa première descente et désormais hors de contrôle, sera capable de rapporter un jour ses échantillons sur Terre…

le 15/12/2005