Médiator, nouvelle affaire médicale

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a annoncé le 16 novembre que le Médiator, médicament principalement utilisé par des diabétiques en surpoids, aurait entraîné le décès d'au moins 500 personnes en trente ans.

Par Romain Lejeune (avec l'AFP), le 28/12/2010

5 millions de personnes traitées

Mediator 150 mg

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) vient de rendre public une étude de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) consacrée au Mediator, médicament prescrit en France de 1976 à 2009 aux diabétiques en surcharge pondérale, puis élargi aux patients souhaitant perdre du poids. Résultat de l'étude : ce médicament aurait provoqué la mort de plus de 500 personnes. La commercialisation du Médiator par le laboratoire français Servier a duré 33 ans, période durant laquelle 5 millions de patients ont été traités en France avec ce médicament dont 2,9 millions pendant plus de 3 mois.

Le 30 novembre 2009, le médicament a été retiré du marché français par l'Afssaps et la décision définitive d'interdire sa commercialisation a été prise le 14 juin 2010 par l'Agence européenne du médicament.

Risque accru de complications cardiaques

Valvulopathie : de quoi s’agit-il ?

Cette interdiction fait notamment suite aux travaux entrepris depuis 2006 par le docteur Irène Frachon, pneumologue au CHU de Brest, qui mettaient alors en évidence le rôle du Mediator dans la survenue de valvulopathies (problème de fonctionnement des valves cardiaques) diagnostiquées chez 43 000 diabétiques consommateurs du médicament depuis plus de trois mois. Les chercheurs avaient alors observé chez ces patients trois fois plus de risques de souffrir de valvulopathie que pour ceux qui suivaient un autre traitement. L'étude de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) commanditée par l'Afssaps a, quant à elle, consisté à suivre durant trois ans (2006 à 2009) l'évolution de 303.000 patients (83 000 hommes et 220.000 femmes dont la moyenne d'âge était de 53 ans) ayant pris du Mediator.

En confrontant ces données avec celles des hospitalisations et des décès, les auteurs de l'étude sont arrivés à la conclusion que plus de 500 morts étaient directement liées à la prise du médicament.

Patients invités à consulter

« Il y aura un envoi de lettres par la Caisse nationale d'assurance maladie à tous les patients ayant pris le traitement durant plus de trois mois, a déclaré Jean Marimbert, directeur général de l'Afssaps, lors de la conférence de presse de l'Agence le 16 novembre. On leur recommandera d'aller voir leur médecin traitant, et si le médecin repère qu'ils ont un souffle cardiaque, il les enverra vers une consultation de cardiologie ».

Selon lui, « plusieurs dizaines de milliers de patients » sont concernées, soulignant par ailleurs que les risques de complications cardiaques liés au Mediator étaient plus importants « dans les deux premières années du traitement et dans les deux années qui suivent l'arrêt du traitement  ». Reste à comprendre pourquoi le retrait du médicament a tant tardé. A l'évidence, un volet judiciaire de cette nouvelle affaire médicale va désormais s'ouvrir.

Romain Lejeune (avec l'AFP) le 28/12/2010