Retour sur les séismes en Emilie-Romagne

Depuis des siècles, l’Italie est victime de nombreux tremblements de terre. Mais comment expliquer que ce phénomène surgisse à intervalles aussi réguliers dans la péninsule italienne.

Par Johana Hallmann, le 01/06/2012

Le 29 mai, le sol a encore tremblé en Italie. C’est la troisième fois cette année, et la deuxième en moins d’une semaine. Le séisme dont l’épicentre est situé en Emilie-Romagne a déjà fait au moins 16 victimes et détruit des milliers de maisons. Quelles sont les causes géologiques expliquant la survenue de ces séismes dans cette région de l’Italie? Y a-t-il un lien avec le très important séisme de l’Aquila en 2009 ? 

Pourquoi le sol italien tremble-t-il autant?

Carte des séismes du mois de mai 2012

« La botte italienne est prise en sandwich entre deux plaques », explique la paléosismologue Lucilla Benedetti, chargée de recherche CNRS au CEREGE , qui revient tout juste d’une mission dans la région touchée. Les plaques eurasiennes et africaines sont en effet en perpétuel mouvement et cisaillent la Méditerranée sur tout son long. L’activité sismique y est donc importante. Et si le nord de l’Italie a été touché par un mouvement de ces plaques, c’est tout simplement « qu’un embranchement long d’environ 150km allant de Reggio nell’ Emilia jusqu’à Rimini s’est mis en mouvement par petites surfaces. Le premier tremblement du 21 mai n’aurait vu se rompre q’une petite portion d’environ 10 km de la faille. Même chose pour celui du 29 mai ... », estime Lucilla Benedetti, tout en soulignant qu’il s’agit d’une approximation. Le second tremblement de terre n’est pas une réplique, mais plutôt la conséquence du premier mouvement « un peu comme un effet domino » selon la chercheuse. Les scientifiques savent depuis longtemps que le risque de secousses est grand dans ces régions et que la magnitude des séismes peut facilement y atteindre l’échelon 6 sur l’échelle de Richte. Rarement plus. Comme le précise Serge Lallemand, directeur de recherche CNRS au laboratoire de Géosciences de l’université Montpellier 2, « les deux plaques se rapprochent certes, mais ce rapprochement est de l’ordre du millimètre par an, ce qui est minime ». Ce faible déplacement ne peut donc pas provoquer de «gros» tremblements de terre. L'Italie tremble donc peu mais souvent.

L'Aquila et Emilia: quels points communs?

différenciation des failles extensives et compressives

Géologiquement parlant, la faille rompue au niveau d’Emilia et la rupture de l’Aquila n’ont strictement rien à voir l’une avec l’autre. Là ou le tremblement de terre d’ Emilia était dû à un rapprochement des couches de sédiments autour de la faille, à l’Aquila s’est produit un effet d’ouverture de la faille. C’est ce que l’on appelle un séisme en extension. « Les Apennins (chaîne de montagnes plus au sud) sont en train de s’ouvrir à cet endroit, un peu comme si on ouvrait une fermeture éclair partant du sud de la Sicile », explique la Lucilla Benedetti. A contrario, au nord du pays, ce sont des chevauchements qui ont eu lieu. « Pour simplifier, on peut parler de « plis » pour les tremblements de terre de cette semaine... ». Sur un plan plus technique, on qualifie le type de faille rompu à l’Aquila d’« extensif », et celui d’Emilia de « compressif ».

Et le futur?

L’activité sismique de l’Italie n’est donc pas près de s’arrêter. La proximité du pays avec les points de contact des plaques africaine et eurasienne en fait un lieu géographique à haut risque sismique. A terme, sur des milliers d’années, le relief italien pourrait changer de façon significative.
En ce qui concerne la prévisibillité de ces tremblements de terre, il est très difficile de localiser toutes les failles si elles ne se sont pas encore manifesté. Emilia en est un bon exemple. Cette faille dite «aveugle» est présente « mais son émergence en surface n’est pas visible à l’oeil nu », précise Serge Lallemand. Certaines zones du pays sont donc en « quiescence » il est donc impossible de savoir si un tremblement de terre aura lieu dans les prochaines années dans la même région.

Pour en savoir plus, une intervention de l’équipe de chercheurs de Lucilla Benedetti et une page de cellule post-sismique ont été mise en place, accessible à cette adresse : https://sites.google.com/site/cellulepostsismique/home/seisme-italie-du-nord-20-mai-2012-mw-6-2

Johana Hallmann le 01/06/2012