Conférence sur la biodiversité: appel pour sauver les espèces de l'extinction

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Par AFP, le 25/01/2005

Les scientifiques réunis lundi pour la conférence internationale sur la biodiversité ont lancé un vibrant appel aux gouvernements pour qu'ils agissent face à la “sixième grande vague d'extinction des espèces depuis l'apparition de la vie sur terre“, selon les mots du président Jacques Chirac.

Sur tous les continents et dans tous les océans s'allument des signaux d'alerte“, a estimé le président français dans son discours d'ouverture, apportant son soutien à l'appel des scientifiques en faveur de la création d'un groupe d'experts mondial sur la biodiversité, comme il en existe un pour le climat.

L'opinion est encore peu consciente des menaces qui pèsent sur la nature. “Pour répondre à l'urgence, nous devons accélérer le mouvement“, a estimé M. Chirac. “Cette biodiversité est le produit de plus de 3 milliards d'années d'évolution“, a plaidé Michel Loreau, président du Comité scientifique de la conférence.

Le “père“ de la notion de biodiversité, l'Américain Edward Wilson, a défini “trois niveaux“: “les écosystèmes, comme les forêts ou les lacs, les espèces telles que l'ours brun, et enfin la variété des gènes qui déterminent les traits de ces espèces“.

La Terre est une planète bien mal connue“, a-t-il rappelé. L'homme n'a décrit que 1,8 million d'espèces, sur les 10 à 30 millions qui existeraient. “Un seul gramme de sol fertile renferme 5.000 bactéries (...), vous avez sans doute une quantité d'espèces inconnues sous les semelles“, a-t-il lancé.

L'homme altère son environnement “à un rythme sans précédent dans l'histoire humaine“, a expliqué M. Loreau. “Les espèces s'éteignent dans le monde à un rythme 100 fois supérieur au taux moyen observé dans l'histoire de la Terre et des dizaines de milliers d'espèces sont condamnées à une extinction future, à cause de la destruction récente de leurs habitats“.

Le ministre kenyan de l'Environnement, Mme Wangari Maathai, prix Nobel de la Paix 2004, s'est souvenue “enfant, avoir vu les forêts brûler pour créer de nouvelles terres cultivées“. “L'homme, qui a été capable de s'embarquer pour l'espace, peut certainement sauver cette magnifique planète“, a estimé M. Wilson.

Avec les moyens modernes comme la photo numérique, dresser un inventaire de la biodiversité ne coûterait pas plus, en 25 ans, que le projet de décryptage du génome humain, soit 3 milliards de dollars, a-t-il estimé.

“Et selon les associations écologistes, 28 milliards de dollars suffiraient à sauver les 25 points chauds les plus menacés de la planète, comme la forêt d'Amazonie“, a-t-il poursuivi.

Face à ces menaces, la Convention de la diversité biologique adoptée à Rio en 1992, ratifiée par 188 pays (mais pas les Etats-Unis) n'a pas stoppé, ni même freiné la dégradation, constatent les scientifiques.

Aussi lancent-ils lundi un “appel de Paris“ pour inciter les gouvernements à l'action. Il propose d'établir un groupe d'expertise intergouvernemental capable de fournir une information incontestable et d'aiguillonner les Etats.

Les travaux du groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat depuis 1988 ont permis de parvenir à un consensus scientifique sur la réalité et la portée du réchauffement climatique que beaucoup, au départ, se refusaient à admettre“, a observé M. Chirac. “Pour la biodiversité, nous avons besoin d'un dispositif similaire“.

M. Chirac a aussi annoncé “la création d'ici à 2006“ des parcs nationaux de la Réunion et de Guyane, celle de nouveaux parcs naturels marins et de réserves naturelles dans les Terres australes et antarctiques françaises. En Nouvelle-Calédonie, la France renforcera la protection de la barrière de corail.

C'est un paradoxe de plus, le grand écart entre les paroles et les actes“ si on se rappelle que le budget 2005 français de l'environnement prévoit “une sérieuse diminution des crédits“ de ce secteur, a répliqué de son côté la porte-parole du PS Annick Lepetit.

AFP le 25/01/2005