Electricité : faut-il avoir peur des lignes à haute tension ?

Les projets de lignes électriques à haute tension se heurtent de plus en plus à l’opposition des riverains, qui craignent leur impact sur la santé et l’environnement.

Par Marc Bertola, le 02/10/2003

Des lignes controversées

Le réseau de transport 225 et 400 kV en France en janvier 2003

Printemps 2003 : les habitants des Pyrénées-Orientales se mobilisent massivement contre un projet de ligne électrique à très haute tension entre la France et l’Espagne. Cette ligne de 400 000 volts, longue de 90 kilomètres (dont une trentaine en France), doit permettre de doubler les échanges d’électricité entre les deux pays. Mais le projet fait peur aux habitants, qui craignent ses conséquences pour le paysage et la santé des populations. A l’issue de trois mois d’un débat public houleux, ils obtiennent finalement que le tracé de la ligne soit revu... Ces dernières années, quatre projets similaires ont fait l’objet d’un débat public en France. Dans certaines communes traversées par une ligne à haute tension, des habitants se sont regroupés pour demander le déplacement des pylônes. Les lignes à haute tension, jadis un élément banal du paysage, sont devenues des objets de controverse.

Quels risques pour la santé ?

Une ligne à haute tension passe à proximité des habitations de Montois-la-Montagne en Lorraine

Les lignes électriques sont-elles dangereuses pour la santé ? La question fait débat depuis le début des années 80. La circulation du courant dans une ligne électrique crée autour de celle-ci des champs magnétiques à très basse fréquence. Ceux-ci peuvent créer à l’intérieur de l’organisme des champs et des courants électriques, avec d’éventuels effets biologiques et sanitaires. Des études épidémiologiques ont montré qu’il pouvait exister une association entre une forte exposition à ces champs et la leucémie de l’enfant, mais la cause de cette association n’est pas établie. Des études de laboratoire sur l’homme et l’animal n’ont pas montré d’effets de façon reproductible.

De plus, sous une ligne haute tension, les champs magnétiques atteignent au maximum 20 microteslas, nettement moins que les limites d’exposition quotidienne recommandées par l’Union Européenne (100 microteslas pour le public, 500 microteslas pour les travailleurs). Mais en 2001, un rapport publié par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a classé les champs magnétiques à très basse fréquence dans la catégorie des agents « peut-être cancérogènes pour l’homme »… Tout en recommandant de nouvelles recherches « pour aboutir à des informations plus concluantes ». Face à ces incertitudes, les opposants aux lignes haute tensions demandent l’application du principe de précaution.

Bernard Veyret, spécialiste des effets des lignes sur la santé



“Il ne faut pas avoir peur des lignes à haute tension“.

L’impact environnemental

Autre enjeu : la biodiversité. Certaines zones traversées par les lignes sont riches en faune et en flore. Ainsi, dans l’aire d’étude du projet de ligne franco-espagnole, on a dénombré 176 espèces d’oiseaux, dont 53 sensibles aux lignes : elles peuvent les heurter soit pendant un vol migrateur soit pendant leurs déplacements locaux. Il existe cependant des moyens de réduire les risques dans ce domaine, notamment grâce à des spirales de couleur posées sur les câbles pour signaler leur présence aux oiseaux migrateurs.

Faut-il enterrer les lignes ?

L’une des solutions de rechange prônées par les opposants aux lignes aériennes est l’enfouissement des câbles dans le sol. Une option qui a l’avantage de préserver le paysage et de protéger les lignes des intempéries (les tempêtes de 1999 avaient endommagé un millier de pylônes, privant des millions de personnes d’électricité). En 2002, RTE*, l’organisme chargé du réseau français, s’est engagé à enterrer un quart des nouvelles lignes haute tension de 63 000 et 90 000 volts (environ 375 km sur un total de 1 500 km prévus sur trois ans).

Problème : dans le cas des lignes à très haute tension (400 000 volts), l’enfouissement coûte cher – au minimum 10 fois plus que les lignes classiques – et il reste pour l’instant limité à des distances de quelques kilomètres. De plus, cette technique n’est pas sans conséquences pour l’environnement : travaux importants, emprise au sol allant jusqu’à 14 mètres, gêne pour l’agriculture…

Cette solution séduit néanmoins l’opinion : un sondage réalisé début 2003 à la demande de l’Observatoire de l’Energie montre que 62 % de la population française est prête à accepter une « légère augmentation de sa facture d’électricité » pour financer l’enfouissement des lignes.

* Réseau de Transport d’Electricité





Comment les lignes à haute tension
sont-elles entretenues ?

Marc Bertola le 02/10/2003