Déchets industriels : que faire des farines animales ?

Il n’y a pas si longtemps, les déchets animaux étaient la matière première d’une industrie prospère. Ils sont aujourd’hui un fardeau encombrant et coûteux. En France, le programme d’élimination se met peu à peu en place tandis qu’au niveau européen, la réflexion est entamée pour utiliser à nouveau certains de ces déchets dans l’alimentation animale. Sous conditions.

Par Philippe Dorison, le 07/10/2003

Où en est la France ?

Depuis le 14 novembre 2000, plus aucun sous produit animal ne peut être recyclé dans la filière de l’alimentation animale.

Or, la France produit environ 3 millions de tonnes par an de tels déchets qui, après un premier traitement, représentent 850 000 tonnes de « farines ». Leur stockage à long terme n’étant pas une solution, il a été décidé de les éliminer par incinération, avec production d’énergie. Les cimenteries traitent dans leurs fours une partie de ces déchets mais ne peuvent suffire à en éliminer la totalité.

Après un appel d’offres, le gouvernement a choisi en octobre 2002 quatre projets qui, ensemble, auront une capacité annuelle de traitement de 220 000 tonnes. Le financement d’un de ces projets a été accepté en mai 2003 par la commission européenne, qui autorise le gouvernement français à y injecter environ 10 millions d’euros sur cinq ans.

Un casse-tête européen

Chaque année, l’Europe produit 16 millions de tonnes de déchets bruts animaux. Avant la crise de la vache folle, ils étaient recyclés dans l’alimentation animale et représentaient un marché de 500 millions d’euros. Aujourd’hui, leur destruction coûte annuellement environ 1 milliard d’euros.

C’est certainement dans l’esprit de réduire cette charge que les experts européens ont réfléchi à la possibilité de réintroduire certains sous produits dans l’alimentation d’autres animaux, tout en réaffirmant le principe que les restes d’une espèce ne doivent jamais être consommés par la même espèce (c’est cette forme de « cannibalisme » qui est à l’origine de l’explosion de la maladie de la vache folle). Une modification du règlement communautaire a donc été promulguée en juillet 2003. Elle va principalement dans le sens d’une séparation des filières de traitement et instaure des règles de traçabilité. De tels outils, si leur validité était confirmée, pourraient permettre par exemple de «… réexaminer les interdictions touchant l'utilisation des farines de poisson dans l'alimentation des ruminants, l'utilisation des protéines de volaille dans l'alimentation des animaux d'élevage autres que les ruminants,…».

Reste à savoir si, malgré toutes les garanties qu’elle cherche à réunir, une telle démarche sera acceptée par les éleveurs, de plus en plus sensibles aux réactions de méfiance des consommateurs.

Philippe Dorison le 07/10/2003