Cellules souches embryonnaires : première importation en France

A l'heure où les cellules souches embryonnaires humaines entrent dans les laboratoires du monde entier, la France vient d'autoriser sa première importation. Entretien avec Marc Peschanski.

Par Lise Barnéoud, le 16/03/2005

Les cellules souches embryonnaires arrivent en France

Cellules souches embryonnaires humaines

L'année 2005 sera-t-elle l'année du coup d'envoi des recherches sur les cellules souches embryonnaires en France ? Six mois après le vote de la nouvelle loi de bioéthique, le gouvernement français vient de signer le décret autorisant l'importation de cellules souches embryonnaires pour la recherche. Il s'agit "d'un dispositif transitoire", a expliqué le ministre de la santé Philipe Douste-Blazy, en attendant la création de l'agence de la biomédecine* prévue pour les prochains mois. Il sera alors possible d'utiliser les embryons dits surnuméraires, c'est-à-dire ceux créés lors des fécondations in vitro et ne faisant plus l'objet d'un projet parental.

La première autorisation d'importation a été donnée à l'équipe du Pr. Marc Peschanski, directeur de l'unité neuroplasticité et thérapeutique de l'Inserm le 16 février 2005. Ses recherches concernent la maladie de Huntington. Dix autres dossiers sont en cours d'instruction.

* L'agence de la biomédecine a été officiellement créée le 5 mai 2005. Les décrets d'application concernant l'utilisation des embryons surnuméraires devraient être publiés sous peu.

Ailleurs : où en est la recherche ?

De plus en plus de pays autorisent désormais les recherches sur les cellules souches embryonnaires

La plupart des grandes nations scientifiques, jusqu'alors très hésitantes pour des questions éthiques, ont commencé à autoriser le travail sur ces cellules souches embryonnaires et à les financer. Ainsi aux États-unis où Georges Bush s'est pourtant déclaré fermement opposé à toute forme d'utilisation de l'embryon humain, plusieurs Etats, notamment la Californie (où 3 milliards de dollars ont été débloqués), commencent à financer ce type de recherche.

En Angleterre, où les expériences sur l'embryon humain sont autorisées depuis 2001, de gros moyens financiers ont également été décidés pour lancer les recherches sur les cellules souches d'embryon. Quant à l'Australie, le moratoire qui existait depuis trois ans sur l'utilisation d'embryons surnuméraires a été levé fin mars 2005.

Les cellules souches pluripotentes

Deux résultats publiés en 2004 paraissent particulièrement prometteurs. Le premier est une étude publiée en août par une équipe new-yorkaise. Des neurones dopaminergiques ont été produits à partir de cellules souches embryonnaires humaines, un espoir pour la maladie de Parkinson où la dopamine fait défaut. La deuxième étude, publiée en octobre 2004, est le fait d'une équipe de Haïfa en Israël. Elle montre que des cellules souches embryonnaires humaines peuvent servir de pacemaker en se différenciant en cellules cardiaques chez le rat.

2004: l'année du clonage humain ?

En février 2004, une équipe de l'Université nationale de Séoul réussissait, pour la première fois, à produire par clonage un embryon humain et à en tirer une lignée de cellules souches. Pour cela, les chercheurs coréens ont utilisé 242 ovocytes provenant de 16 femmes, ont retiré leur noyau et les ont remplacés par des noyaux prélevés sur des cellules de la donneuse (auto-clonage). Ils ont ainsi obtenu trente embryons qui se sont développés jusqu’au stade de blastocyste (5-7 jours), dont vingt ont été utilisés pour prélever des cellules souches. Mais sur ces vingt embryons, une seule lignée a réussi à donner des cellules souches pluripotentes (capables de fournir tous les tissus qui apparaissent au cours du développement humain).

Cette première pourrait bien se répéter puisque l’Angleterre vient d’autoriser deux équipes à cloner des embryons humains à des fins de recherche. La dernière autorisation, qui date du 8 février 2005, concerne l’équipe dirigée par Ian Wilmut, le « père » de la brebis Dolly dans le cadre de ses recherches sur les maladies neurologiques, notamment la maladie de Charcot.

Lise Barnéoud le 16/03/2005