Le saut de puce enfin expliqué

Des chercheurs ont pour la première fois filmé des sauts de puces. Une petite prouesse qui leur a permis de comprendre très exactement comment elles font pour sauter.

Par Viviane Thivent, le 17/02/2011

Les deux théories sur les sauts de puce

L'énigme taraudait les scientifiques depuis près de quarante ans. Mais aujourd'hui, enfin, grâce à deux chercheurs de Cambridge, on sait comment les puces font pour sauter (G. Sutton et M. Burrows, Journal of Experimental Biology, février 2011). La question pourrait paraître triviale, pourtant elle est bien réelle. Les sauts de puce sont en effet trop puissants pour n'être le fruit que d'une simple contraction musculaire. Alors comment s'y prennent-elles ?

En 1967, un chercheur d'Oxford, Henry Bennet-Clark, répond partiellement à la question. Il montre qu'avant de sauter, la puce bloque ses pattes arrière en position repliée, puis contracte deux gros muscles dorso-ventraux qui, en retour, déforment une petite région du thorax. Celle-ci agit alors comme un ressort sous tension. La puce n'a plus qu'à débloquer ses pattes pour se retrouver catapultée dans les airs.

Le hic, c'est que personne n'avait été capable de comprendre comment l'énergie stockée par le thorax était transmise au sol. La puce prend-elle appui sur la partie antérieure de ses pattes ou sur sa partie postérieure ?

Jeu de lumière

Pour répondre à cette question, les chercheurs ont filmé les sauts de dix puces adultes à l'aide d'une caméra ultrarapide. Une chose plus facile à dire qu'à faire. D'abord parce que les puces sont petites et donc difficiles à suivre avec une caméra. Ensuite parce qu'elles ne sautent pas sur commande. Enfin, sauf si l'on sait leur parler. Car à force de se focaliser sur ces bestioles, les chercheurs ont fini par remarquer que les puces étaient sensibles aux changements de lumière. Elles restent immobiles dans le noir et se mettent à sauter lorsque la lumière revient. D'où l'idée d'allumer la lumière pour filmer l'envol. Les chercheurs ont ainsi pu filmer 51 sauts et prouver que les puces prennent bien appui sur l'arrière de la patte pour s'envoyer en l'air.

À l'occasion de ces travaux, les chercheurs ont aussi montré que les puces ne décollent guère au-delà d'un angle de 24°. Un état de fait assez décevant pour une sauteuse aussi réputée. Nombre d'insectes et d'araignées sauteuses possèdent en effet une marge de manœuvre bien plus importante.

Viviane Thivent le 17/02/2011