7000 ans d'inégalités sociales

Il y a plus de 7000 ans, au Néolithique, les inégalités sociales existaient déjà. C’est ce que mettent en évidence des archéologues britanniques après avoir étudié des sépultures d’agriculteurs, vraisemblablement pas tous logés à la même enseigne.

Par Johana Hallmann, le 09/06/2012

En période de crise, les différences entre riches et pauvres sont pointées du doigt plus qu’à l’accoutumée. Mais cela ne date pas d’hier. Beaucoup pensent que la sédentarisation est à l’origine d’une organisation sociale hiérarchique. Une équipe d’archéologues de l’université de Bristol dirigée par Alexander Bentley a confirmé cette hypothèse en étudiant les ossements de plus de 300 squelettes datés du Néolithique, et en comparant le rapport de deux isotopes du strontium mesurés sur leurs dents.

Un marqueur efficace

Squelette d’un fermier australien âgé de 7000 ans

Le strontium, que l’on retrouve dans l’eau et les sols, est un marqueur géologique. La mesure du rapport entre deux de ses isotopes (le Strontium 87 et le 86) permet en effet de caractériser la fertilité de la terre. Ce rapport lorsqu’il est mesuré dans les dents de nos ancêtres permet d’associer, s’il est similaire, l’agriculteur à son champ. A une époque ou le commerce était encore peu développé, les premiers fermiers consommaient en effet le produit de leur agriculture .

Or, en mesurant le taux de strontium dans l’émail, les archéologues ont observé que tous les défunts n’étaient pas logés à la même enseigne. Certains possédaient la signature isotopique caractéristique des terrains fertiles de loess, et d’autres, celle de terres beaucoup plus pauvres. Cela appuie donc l’hypothèse d’une organisation sociale hiérarchique à cette époque.

Des outils pour les plus riches

Une herminette retrouvée dans les tombes

Des herminettes ont été retrouvées dans certaines sépultures. Ces outils similaires à des haches étaient en effet très utilisés à cette époque, ou les balbutiements de l’agriculture nécessitaient de déboiser les espaces forestiers pour laisser la place aux champs. Or, les archéologues ont observé que les hommes enterrés avec des herminettes étaient ceux dont la signature isotopique dentaire correspondait aux terrains fertiles. Ils en ont donc déduit que les fermiers les plus riches étaient sans doute ceux enterrés avec le plus d’ornements.

Les femmes désavantagées

Sur les 311 squelettes étudiés, 153 étaient des femmes. Les chercheurs ont donc également mesuré leur taux de strontium et ont observé qu’il était similaire à celui des fermiers les moins bien lotis. Ce qui suggère qu’elles auraient grandi dans des terrains moins fertiles, et qu’elles se seraient déplacées jusqu’aux terrains des agriculteurs plus fortunés afin d'y fonder une famille.

Selon le professeur Bentley, « il semble que l’ère néolithique ait introduit le concept d’héritage foncier en Europe et que cette inégalité des richesses a vraiment débuté à ce moment-là. Après cela, évidemment, il n’y a plus eu de retour en arrière possible et ces inégalités de richesses n’ont cessé de croitre ».

Johana Hallmann le 09/06/2012