Imagerie : les premières 24 heures d'un embryon

Grâce à une nouvelle technique de microscopie, une équipe allemande est parvenue à visualiser, cellule par cellule, le développement d'un embryon de vertébré, le poisson zèbre. En résulte les images saisissantes d'un amas cellulaire qui se modèle et s'organise, selon une symétrie axiale.

Par Viviane Thivent, le 22/10/2008

Le boum des GFP

On les a "greffées" à une quantité incalculable de protéines. On les a déclinées, modifiées, de manière à ce qu'elles brillent dans toute la gamme des couleurs de l'arc-en-ciel. Cette année, leur découverte a même été récompensée par un [qactu:10763]prix Nobel de chimie[/qactu]. Bref, pour ceux qui l'ignoraient encore, les GFP - ou Green fluorescent proteins – sont, depuis une quinzaine d'années, essentielles à l'imagerie du monde moléculaire. Et ce ne serait peut-être qu'un début car une équipe allemande propose en effet une façon inédite de les exploiter* en utilisant un nouveau type de microscope, le DSLM ou Digital scanned laser light sheet fluorescence microscopy.

Aussi incontournable soit-elle, la méthode du marquage aux GFP comporte néanmoins certaines limites. Si elle est, par exemple, appliquée à un grand nombre de cellules et que celles-ci sont regroupées, cela engendre un signal lumineux si complexe, si confus, qu'il devient impossible de l'analyser. Cas typique d'un processus que les GFP échouent à mettre en lumière : le développement d'un embryon de vertébré. Et pour cause : d'une cellule au moment de la fécondation, l'embryon passe à... 16 000 cellules en 18 heures !

* P. Keller et al., Sciencexpress, octobre 2008, doi : 10.1126/science.1162493

Rideau de lumière

Pour régler le problème, l'équipe allemande propose une idée toute simple. Puisqu'il est impossible de gérer la totalité du signal émis par un embryon, il n'y a qu'à le "saucissonner" (on veut parler ici du signal, pas de l'embryon...)

Les chercheurs ont ainsi développé une technique d'imagerie permettant de scanner en permanence un embryon à l'aide d'un faisceau lumineux plat et très fin. Une technique qui permet de n'exciter les GFP que transitoirement, c'est-à-dire seulement lorsque le faisceau de lumière les atteint. Le signal s'en trouve simplifié et il ne reste plus qu'à placer, en sortie, des capteurs et un ordinateur capable d'analyser les informations reçues pour reconstituer l'image de l'embryon.

L'embryon digital

A l'aide de ce dispositif, les chercheurs sont parvenus à suivre le développement d'un embryon de poisson zèbre pendant 24 heures. Comme escompté, ils ont obtenu les images d'un "embryon digitalisé". Cela leur a permis de suivre, simultanément, le déplacement de chacune des milliers de cellules embryonnaires. Par la suite, ils ont observé la vitesse de développement de l'embryon. Comment ? En programmant l'ordinateur pour qu'il calcule la vitesse de déplacement de chaque cellule et qu'il distingue les cellules mères des cellules filles.

Au-delà, ils ont même discriminé les cellules en fonction de la direction de leur déplacement. De quoi observer la mise en place de la symétrie axiale de l'embryon et identifier certaines des relations unissant ectoderme et endoderme, tissus qui apparaissent au tout début de l'embryogenèse.

Viviane Thivent le 22/10/2008