Des moustiques entre amour et harmonie

On le croyait dur de la feuille. Mais non. Une équipe américaine vient de montrer qu'Aedes aegypti, le moustique vecteur de la dengue, entend bien mieux que prévu. Il utilise même les sons pour repérer dans son environnement des individus de sexe opposé prêts à s'accoupler.

Par Viviane Thivent, le 09/01/2009

Système de reconnaissance à distance

Aedes aegypti

Quiconque a déjà dormi dans la même pièce qu'un moustique saura que cet insecte fait du bruit quand il vole. Un « bzzee » dont la fréquence varie en fonction du genre de l'individu. Un mâle de l'espèce Aedes aegypti produit ainsi un « bzzee » plus aigu (environ 600 Hz) que la femelle (environ 400 Hz). Pour le dormeur, cette information n'a que peu d'intérêt ; en revanche, pour le moustique, elle est cruciale car elle lui permet d'identifier un partenaire sexuel. Et une équipe américaine vient de montrer comment*.

Les chercheurs ont commencé par fixer des moustiques, mâles et femelles, sur des baguettes individuelles de façon à ce que les insectes puissent battre des ailes à loisir sans pour autant s'envoler. Ils ont ensuite approché ou éloigné les moustiques les uns des autres, tout cela pour s'apercevoir que lorsque des individus de sexe opposé étaient suffisamment prêts l'un de l'autre (1,5-2 cm), la fréquence de leurs battements d'ailes se mettait à varier. À varier jusqu'à entrer en harmonie...

* L. cator et al., Sciencexpress, 8 janvier 2009.

Un accord tacite avant l'accouplement

La plupart des sons sont en effet composés de plusieurs types de fréquences : la fondamentale – la fréquence la plus basse du son, celle qui constitue en quelque sorte la « note » – et les harmoniques – des sons dont la fréquence est deux fois, trois fois (etc.) plus élevée et l'intensité moins forte que celle de la fondamentale. Ainsi, pour la femelle, si la fondamentale est d'environ 400 Hz, les harmoniques seront d'environ 800 Hz et de 1200 Hz. De même, si la fondamentale de son mâle est de 600 Hz, les harmoniques seront de 1200 Hz et de 1800 Hz. Dans les deux cas, une fréquence proche de 1200 Hz apparaît. Or, d'après les chercheurs, lorsqu'un mâle et une femelle sont en présence, ils se mettent à moduler la vitesse de leurs battements d'ailes jusqu'à produire exactement la même fréquence harmonique, celle située aux alentours de 1200 Hz. Cette synchronisation n'a cependant pas lieu lorsque la femelle a d'ores et déjà été fécondée par un mâle. Par ce système de communication, les mâles pourraient ainsi détecter très facilement les femelles qu'il reste à féconder, ce qui accroît le succès reproducteur de l'espèce. Un trait de caractère qui pourrait être détourné par les chercheurs pour, à l'inverse, tenter de diminuer la prolifération de cette espèce porteuse de maladies.


Viviane Thivent le 09/01/2009