Soigner, prévenir... guérir ? Les approches actuelles et futures

Des médicaments contre les symptômes

Si la maladie d'Alzheimer reste pour l'heure incurable, il semble tout de même possible d'en réduire certains symptômes.

Depuis quelques années, il existe des médicaments qui peuvent améliorer les capacités d'attention et retarder l'apparition des troubles comportementaux*. Trois d'entre eux augmentent dans le cerveau la quantité d'acétylcholine, un neurotransmetteur nécessaire au fonctionnement des cellules nerveuses et dont la production diminue chez les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer**. Ils seraient d'autant plus efficaces qu'ils sont pris tôt.

Le quatrième – la mémantine – agit sur un autre neurotransmetteur, le glutamate ; il est quant à lui indiqué dans les formes plus sévères de la maladie d'Alzheimer. Les deux classes de médicaments peuvent être associées pour potentialiser les effets.

Néanmoins, ces traitements peuvent avoir des effets cardiovasculaires graves***. Et comme ils n'agissent que sur les symptômes, ils n'empêchent pas la maladie de progressivement gagner du terrain.

* Parmi les troubles du comportement : apathie, agressivité, troubles du sommeil, déambulation, hallucinations. La maladie s'accompagne également de troubles psychiques qui justifient parfois la prise d'un antidépresseur, en plus du traitement spécifique à la maladie d'Alzheimer. ** Ces médicaments agissent en inhibant l'enzyme qui dégrade l'acétylcholine (acétylcholinestérase). Ils ont succédé à la tacrine, premier médicament anti-Alzheimer à être commercialisé. *** Sur les 52 cas enregistrés en France avec des troubles cardiovasculaires graves liés à la prise de ces médicaments, 22 patients sont morts. Source : Centre régional de pharmacovigilance d'Angers, 2006.

Le feuilleton du vaccin

L'un des axes de recherche les plus étudiés pour vaincre la maladie est l'immunothérapie. Objectif ? Faire en sorte que le système immunitaire s'attaque aux plaques amyloïdes et les élimine. Comment ? En injectant directement le peptide bêta-amyloïde, responsable des plaques, afin de stimuler la production d'anticorps.

Dès 1999, des expériences menées sur des souris transgéniques révèlent l'efficacité d'une telle approche : l'animal vacciné produit des anticorps contre le peptide bêta-amyloïde qui empêchent la formation des plaques, voire les fait disparaître. Des vertus préventives et curatives qui conduisent à un premier essai chez l'homme en 2001. Essai qui sera interrompu en 2002 suite à la survenue d'effets secondaires graves (encéphalites) chez 6% des patients (18 cas sur 300)*. D'autres vaccins sont actuellement à l'étude, soit avec des fragments du peptide bêta-amyloïde afin de limiter la réaction inflammatoire, soit en injectant directement des anticorps dirigés contre le peptide. Des essais sont en cours ou vont démarrer en 2007 chez l'homme.

* Des résultats publiés le 7 avril 2005 dans la revue Neurology confirment néanmoins l'intérêt de ce vaccin qui a notamment permis une amélioration de certaines fonctions cognitives. Les effets observés chez les malades sont proportionnels à leur quantité d'anticorps contre le peptide bêta-amyloïde.

Les médicaments du futur

Aujourd'hui, les médicaments agissent uniquement sur certains symptômes de la maladie d'Alzheimer. L'étape suivante est d'arriver à stopper le processus pathologique. Les stratégies thérapeutiques en cours de développement ont donc pour cible les principaux constituants des lésions caractéristiques de la maladie, à savoir le peptide bêta-amyloïde et les protéines Tau. Avec un inconvénient majeur : leur localisation dans le cerveau, qui impose le développement de produits capables de traverser la barrière hémato-encéphalique*.

Parmi les pistes de recherche explorées, des médicaments, des vaccins et des protocoles de thérapie génique visant à réduire la production de peptide bêta-amyloïde, ou encore la mise au point de produits « neuroprotecteurs », qui éviteraient la dégénérescence des neurones. Quels qu'ils soient, les médicaments de demain ne conduiront pas encore à la guérison mais empêcheront la progression des symptômes.

* La barrière hémato-encéphalique agit comme un filtre en empêchant les substances sanguines de passer librement du sang au liquide céphalo-rachidien. Elle isole ainsi le système nerveux central du reste de l'organisme et lui permet d'avoir un milieu spécifique.

Les facteurs de risque

L'âge est le principal facteur de risque dans la survenue de la maladie d'Alzheimer : même si celleci peut se déclencher avant 50 ans, la plupart des personnes atteintes ont plus de 70 ans. Les antécédents familiaux jouent également un rôle (voir «Quelle est la part des gènes ?» dans la partie 2).

Par ailleurs, les études épidémiologiques* montrent que les femmes sont plus souvent touchées que les hommes et ce, en partie pour des raisons hormonales. L'hypothèse actuellement à l'étude est que la diminution d'oestrogènes – qui auraient des effets protecteurs sur le cerveau – au moment de la ménopause serait responsable de ce risque accru de maladie d'Alzheimer chez les femmes.

Enfin, d'autres facteurs comme l'hypertension artérielle, le diabète et les accidents vasculaires cérébraux peuvent favoriser l'entrée plus précoce dans la maladie.

* En France, la première étude liée aux pathologies neurodégénératives et portant sur une importante cohorte (plus de 4 000 personnes) a été lancée à Bordeaux en 1988 sous le nom de Paquid (Personnes âgées, Quid ?). Elle est suivie neuf ans plus tard par l'étude 3 C (pour 3 cités) qui inclut près de 10 000 habitants de plus de 65 ans de Bordeaux, Dijon et Montpellier.

Les pistes de prévention

Reculer l'entrée dans la maladie, tel est l'objectif de la prévention. L'impact, en terme de santé publique, serait loin d'être négligeable : le simple fait de reculer de cinq ans l'entrée dans la maladie pourrait diminuer de 50% le nombre de malades*.

La piste la plus sérieuse est le traitement de l'hypertension artérielle : outre une diminution des démences de type vasculaire, il réduirait également le risque de développer une maladie de type Alzheimer. Les statines, médicaments contre l'hypercholestérolémie, suscitent également beaucoup d'espoirs mais les résultats à ce jour restent controversés.

Autre piste : la nutrition. Le régime méditerranéen ainsi qu'une consommation régulière de poisson seraient associés à un risque moindre de développer la maladie**. Tout comme un niveau d'éducation élevé, la pratique d'activités après la retraite, l'exercice physique et une vie sociale importante.

* Selon le « Livre vert de la maladie d'Alzheimer », Association France Alzheimer, juin 2006. ** Une étude d'une durée de cinq ans (2006-2011) a été lancée sur 4 000 personnes à Montauban pour tester l'impact d'un complément en Oméga-3 dans la prévention de la maladie d'Alzheimer.

Vivre avec… au mieux !

À côté des médicaments, diverses approches thérapeutiques non médicamenteuses ont vu le jour : ateliers mémoire, ergothérapie, art-thérapie, musicothérapie… Pour susciter la prise de parole, certains ateliers (dits de « réminiscence ») s'appuient sur des objets du passé (photographies, musiques etc.) permettant l'évocation de souvenirs anciens ; d'autres font appel à l'empathie (méthode dite de « validation ») pour mieux comprendre les besoins des patients.

Toutes ces approches ont pour objectif de stimuler les capacités restantes de la personne malade afin d'améliorer sa qualité de vie, son bien-être. Pratiquées depuis quelques années en France*, elles n'ont pas encore été validées au plan scientifique. Une étude française d'une durée de deux ans doit démarrer en 2007 pour évaluer l'efficacité des méthodes de stimulation de la mémoire et vérifier l'amélioration réelle de l'état des malades. Cependant, centrée sur les performances intellectuelles, cette étude ne permettra pas d'évaluer l'effet de ces traitements non médicamenteux sur le bien-être des patients.

* Ces approches ont réellement émergé en France il y a cinq à dix ans mais elles sont pratiquées dans d'autres pays (comme les Pays-Bas) depuis déjà une vingtaine d'années.

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