74650871_Risque2.indd - page 13

16
RISQUÉ?!
les rats, les pathologies qu’on ne voit qu’en temps de guerre,
le sida, les suicides… Tout le monde avait l’air de trouver
cela presque normal. J’étais la seule en 1994 à aller parler
dans les radios et les journaux et ça passait très bien. La
pénitentiaire n’était pas mécontente, elle essayait de tirer de
petits avantages de mes prestations… La prison n’était pas à
la mode», poursuit-elle. Le temps passe, avec son cortège de
désespoirs, de misères humaines, d’épidémies, de trafics en
tous genres. Quand une journaliste lui présente un éditeur,
Véronique Vasseur n’hésite pas une seconde à publier
ses sept années de réflexions écrites au scalpel. On est en
l’an 2000. « Je ne me suis pas posé de question, reconnaît-
elle. Je savais que je prenais des risques en racontant cette
ville dans la ville avec ses règles, ses malfrats, ses VIP,
ses terroristes, ses travestis qui ont la mention “spéciale”
inscrite sur la porte de leur cellule…Un univers parallèle où
règnent la saleté, la détresse, la maladie, la perversité… Je
ne voulais pas être complice, couvrir par mon silence toutes
ces aberrations, mais ni moi ni l’éditeur n’avions mesuré
l’ampleur des réactions en chaîne. » Une bombe qui va faire
exploser les murs. La veille de la sortie du livre,
Le Monde
lui
consacre une double page sous le titre «La Santé, l’horreur ».
L’administration pénitentiaire nie en bloc et invite à des
journées portes ouvertes la presse nationale, puis la semaine
suivante la presse étrangère. S’ensuit un déluge d’articles. Les
politiques mouillés jusqu’au cou créent deux commissions
parlementaires qui viennent procéder à des vérifications sur
place. «Pour montrer que j’étais cinglée, ils avaient passé un
coup de blanc et de bleu en vitesse dans les couloirs, et un
1...,3,4,5,6,7,8,9,10,11,12 14,15,16,17,18,19,20,21,22
Powered by FlippingBook