Le virus de la grippe détourne le fonctionnement normal de nos cellules à son profit. En décrivant la protéine responsable de ce « piratage », une équipe française apporte du nouveau dans la lutte contre ce fléau. Avec peut-être un médicament à la clé ?
Une protéine voleuse
Pour lutter contre la grippe, la première étape est de bien connaître tous les composants du virus. Un groupe de chercheurs grenoblois vient ainsi de décrire avec précision la structure et la fonction d'une protéine du virus de la grippe : la polymérase (Dias et al., Nature, 4 février 2009). Libérée dans la cellule lors de l'infection par le virus, cette protéine permet aux ARN viraux d'être copiés et traduits en protéines.
Comment ? « Elle dérobe à un brin d'ARN de la cellule un petit fragment nommé "coiffe", sorte de signal chimique qu'elle fixe sur l'ARN viral », explique Alexandre Dias, coauteur de la publication. Résultat : la cellule confond l'ARN du virus avec ses propres brins d'ARN. Ni vu ni connu, l'ARN viral sera ensuite traduit en protéines par et à l'insu de la cellule infectée. La polymérase occupe donc une place centrale dans le mécanisme de prolifération du virus.
Un médicament unique contre toutes les grippes ?
Pour les chercheurs, cette protéine a un autre avantage, et non des moindres : elle est présente et identique chez tous les virus, même ceux responsables de la grippe aviaire. De fait, trouver une molécule qui bloque l'action de la polymérase permettrait de lutter en même temps contre toutes les souches de la grippe.
En outre, avec la polymérase, c'est à une autre étape de l'infection que les chercheurs s'attaquent. «Actuellement, les antiviraux agissent contre des parties responsables de l'entrée du virus dans la cellule ou de sa sortie et non de sa réplication », constate le chercheur. Un tel médicament complèterait donc les moyens de lutte (médicaments et vaccins) contre chaque nouvelle souche de virus de la grippe.