Ipergay : un nouvel essai dans la prévention du sida

Afin d’évaluer l’efficacité préventive des antirétroviraux lors de rapports sexuels non protégés, l’Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS) lance un nouvel essai auprès d’homosexuels séronégatifs ayant des pratiques à risque.

Par Paloma Bertrand, le 11/01/2012

Un comprimé de Truvada®

Les antirétroviraux utilisés pour réduire la présence du virus chez les personnes infectées par le VIH ont aussi fait leur preuve pour limiter la transmission du virus de la mère à l’enfant lors de la grossesse et comme traitement d’urgence après un rapport sexuel non protégé.
L’idée de mettre sous traitement des personnes séronégatives à haut risque pour limiter les nouvelles contaminations fait depuis quelques années l’objet d’essais cliniques dans le monde. Avec des résultats contrastés qui n’ont pas encore permis de poser avec certitude un avis sur l’efficacité de cette stratégie de prévention. Parmi ces études, l’essai Iprex mené principalement en Amérique du Sud et en Thaïlande sur 2500 volontaires – des hommes homosexuels séronégatifs – a montré une diminution de 44% du risque de contamination chez ceux qui prenaient un antirétroviral quotidien (Truvada®).

En janvier 2012, l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS) lance un nouvel essai baptisé Ipergay qui s’adresse à la même population que l’essai Iprex (des hommes homosexuels séronégatifs ayant des comportements à risque, c’est-à-dire qui n’utilisent pas systématiquement un préservatif tout en ayant plusieurs partenaires sexuels) mais qui propose, cette fois, de tester l’efficacité d’une prise intermittente de Truvada®. Un essai « randomisé en double-aveugle contre placebo » : un participant sur deux, après tirage au sort, recevra le Truvada® et l’autre un placebo, mais ni les participants ni les médecins ne sauront ce qu’ils reçoivent. Les volontaires devront donc combiner ce traitement aux autres modes de prévention qu’ils utilisent déjà.

Ce traitement pris par intermittence, c’est-à-dire uniquement lors de périodes d’activité sexuelle, est une première car toutes les études menées précédemment nécessitaient une prise quotidienne et au long cours du traitement. Pour Jean-Michel Molina, responsable scientifique de l’essai « cette stratégie devrait permettre d’éviter les contraintes d’une prise permanente d’antirétroviraux et favoriser une bonne observance de la prise du médicament, tout en permettant de limiter les effets secondaires et le coût du traitement. Par ailleurs, l’incertitude de recevoir ou non un placebo devrait attirer l’attention de tous les volontaires sur la nécessité de maintenir ou de renforcer leur prévention afin de limiter au maximum les risques d’infection par le VIH ».

Concrètement, deux comprimés seront à prendre avant le premier rapport sexuel, puis un comprimé toutes les 24 heures pendant la période d’activité sexuelle et une dernière prise de comprimé après le dernier rapport. L'efficacité éventuelle sera mesurée par comparaison entre les deux groupes : celui recevant le placebo et celui recevant le Truvada®.

La campagne de recrutement de volontaires débute fin janvier. Avec, tout d’abord, une phase pilote d’une durée d’un an maximum portant sur 300 volontaires, l’essai Ipergay devant au final concerner 2000 participants.

Paloma Bertrand le 11/01/2012