Les fourmis possèdent différents mécanismes leur permettant de trouver leur chemin dans le voisinage de leur nid. Certaines espèces peuvent se servir de repères visuels. D’autres sont capables d’intégrer le chemin, c’est-à-dire d’enregistrer tous leurs mouvements (pas) depuis la sortie du nid et d’y retourner directement en utilisant la polarisation de la lumière comme une boussole. Enfin, les pistes chimiques (phéromones) sont utilisées par de nombreuses espèces pour « organiser » collectivement les mouvements.

Le terme stigmergie, proposé par le biologiste Pierre-Paul Grassé en 1959, recouvre la notion de communication par une modification de l’environnement : les phéromones de piste sont des substances chimiques volatiles produites par les fourmis, qui les déposent pour communiquer indirectement un chemin à leurs congénères. Ces dernières vont à leur tour, si elles suivent cette piste, la renforcer en déposant également des phéromones.
Pour contrebalancer cette accumulation, les phéromones s’évaporent avec le temps : cela permet « d’oublier » un chemin qui n’a plus d’intérêt. La construction d’un chemin est utile aux fourmis afin d’exploiter une source de nourriture. Elles y reviennent de très nombreuses fois pour prendre une petite quantité de nourriture et la ramener au nid.

Si ce mécanisme de marquage de chemin, déjà très pratique pour ne pas se perdre, est observé de plus près, on se rend compte qu’il permet aussi d’optimiser la trajectoire : les raccourcis reçoivent un tout petit plus de phéromones car ils sont parcourus un peu plus rapidement que d’autres chemins. Cette différence sera amplifiée par le grand nombre de fourmis qui circulent et le raccourci deviendra finalement le chemin principal.

Ce mécanisme d’optimisation de chemin a été traduit informatiquement et mathématiquement. Il sert à imaginer de nouveaux algorithmes d’optimisation.

L'expert

Nicolas Monmarché, docteur en informatique, est enseignant chercheur à l'université de Tours. Il est spécialisé dans le développement d’algorithmes bio-inspirés tels que les algorithmes évolutionnaires, où les principes de la sélection naturelle sont réinterprétés sous un angle informatique. Il s'intéresse en particulier à ceux qui mettent en œuvre des fourmis artificielles, en explorant d’autres comportements collectifs que la stigmergie et d’autres champs d’application que l’optimisation. 

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