Quelle est la quantité d’eau requise ?

Selon l’Association des Producteurs de gaz du Québec, les quantités d’eau utilisées sont infimes comparativement à celles utilisées dans d’autres domaines. Environ 10.000 m3 d'eau sont utilisés pour fracturer un puits gazier, ce qui est inférieur à la quantité d'eau utilisée chaque mois pour l'entretien d'un terrain de golf. À titre comparatif, le développement de 400 puits horizontaux n'utiliserait que 1 % de l'eau utilisée par l’industrie des pâtes et papiers au Québec. D'autre part, pendant la phase exploratoire, l'eau, injectée dans le puits pour la fracturation, est ensuite en partie récupérée et transportée à des usines d'épuration, où elle est traitée et peut être retournée dans son milieu naturel.

Ces chiffres paraissent rassurants, mais une étude produite par le Munk Center for International-Studies de l’Université-de-Toronto, démontre que le volume total d’eau utilisé pour 10 puits gaziers est 9 fois plus élevé, que le chiffre indiqué par l’industrie.

De plus, avec le forage horizontal, l’augmentation de la superficie de récolte gazière souterraine nécessite une augmentation exponentielle de la quantité d’eau nécessaire.
A raison de 7 à plus de 15 millions de litres d’eau pour chaque fracturation hydraulique, l’exploitation des gaz de « schiste » risque de drainer les ressources en eau potable des cultures et de la consommation. Cette mobilisation concerne directement les aquifères prélevés, les couches de « schiste » exploitées ainsi que les aquifères dans lesquels l’eau récupérée est injectée.

En réponse à cela, les gaziers proposent d’utiliser des « nappes phréatiques non potables », trouvées à grande profondeur.

Cependant, l’hydrogéologue Séverin Pistre semble plus sceptique, au laboratoire Hydrosciences de l’Université de Montpellier II. Les aquifères salins chauds très profonds sont difficiles à exploiter, très chargés en minéraux lourds et leur débit n’est en rien garanti. De plus, le prélèvement massif dans ces ressources risque de modifier l’équilibre et de faire baisser le niveau des nappes phréatiques potables.

D’où proviendra majoritairement l’eau nécessaire à la fracturation hydraulique ?

Le problème n’est pas réellement la quantité totale d’eau utilisée lors du procédé, mais bien l’endroit où est prélevée cette eau. Son transport par camionnage doit être le plus court possible afin de réduire également la hausse des émissions de gaz à effet de serre. Au Québec, la Loi sur les mines donne au promoteur le pouvoir de se servir de l’eau des rivières avoisinantes et du système d’aqueduc pour arriver à ses fins. De même elle le laisse exercer son pouvoir d’expropriation pour détourner les dites rivières nécessaires aux activités d’exploration, sans se soucier des conséquences de tels actes sur les populations environnantes

Que fait-on des eaux utilisées et de leur stockage ?

Environ 40 % de l’eau utilisée est expulsée du puits.Ces rejets ne peuvent servir à nouveau, en raison du risque de corrosion qu’ils feraient courir aux installations industrielles. L’eau doit même être décontaminée avant d’être envoyée à l’usine chargée de les traiter. C’est sur ce point qu'il y a  beaucoup de problèmes aux USA et au Canada.

En attendant, les eaux - ou plus exactement les boues de forage - sont stockées dans des bassins de rétention.

Mais les installations de ces bassins de décantation sont très rudimentaires. Creusées grossièrement, elles sont tapissées d’une couche de textile synthétique pouvant facilement être percée par un stylo, comme le montrait l’édition du 14 octobre 2010 de l’émission Infoman, sur les ondes de Radio-Canada.

L’instauration de bassins plus étanches est relativement onéreuse. Ces eaux sont potentiellement destinées à être traitées dans un futur proche et incertain à la fois, car plusieurs municipalités ne veulent et/ou ne peuvent pas traiter les boues de forage de l’industrie. Il est donc important de s’en occuper au plus vite.

Les agriculteurs craignent le pire pour la qualité de leurs productions, pour eux-mêmes et pour  les terrains avoisinant les puits.

Une déchirure de la toile, un débordement des bassins dû à une forte pluie, une fuite dans les canalisations risquent de contaminer les aliments, d’appauvrir les sols ou de les rendre impropres à la production agricole.

Certains craignent également les conséquences du mélange de tous ces composés chimiques. Chaque produit en soi peut être inoffensif, mais qu’en est-il du cocktail chimique que représente l’ensemble de ces produits ? Et lors du retirement progressif de l’eau à travers le sous-sol et le sol, qu’en est-il du phénomène de concentration des produits chimiques, laissés derrière elle ?

Qui retraitera les eaux utilisées ?

Ne pas les récupérer revient à laisser les produits chimiques nocifs dans le sol.

Ces produits ne peuvent pas, pour la majorité, être dégradés de façon microbiologique, car plusieurs produits contenus dans les fluides sont des désinfectants empêchant la croissance microbienne, tel l’acide chlorhydrique – HCL -.

Si l’industrie ne peut pas les récupérer, sa deuxième option consiste à déverser les eaux souillées directement dans la nature, comme cela s’est fait à quelques reprises aux Etats-Unis. Ce type de rejet concernerait au moins cinq états : Pennsylvanie, Colorado, Ohio, Texas et Virginie occidentale.

Qui va donc assurer la relève pour éviter cette deuxième solution catastrophique ?

Plusieurs municipalités ont fermé la porte de leurs installations aux boues de forages des industries gazières.Elles évoquent leur incapacité à subvenir à une aussi grosse demande sans compromettre leur première mission, celle de traiter les eaux de rejet des citoyens et des entreprises déjà en place. En outre, elles n’ont guère été conçues pour filtrer des produits d’une telle toxicité.